Découvert par hasard sur un site de torrent bien connu, ce film de sabre coréen mérite le coup d’œil. Ses qualités viennent précisément de ce que les critiques lui reprochent : intrigue minimale, personnages peu développés, émotion retenue, esthétisation excessive, mélange des genres. Comme d'autres arts, le cinéma ne sert pas qu'à raconter des histoires ou à dépeindre des mœurs, mais à atteindre une forme de beauté.
Ce film n'est ni un divertissement grand public ni un film naturaliste. Il y a de l'action mais il ne se "passe rien" en terme d'intrigue et tant mieux ; il nous laisse contempler son charme formel, son montage dynamique, ses plans soignés, structurés, ses contrastes entre les couleurs éclatantes autour de l'héroïne et le noir autour de l'antagoniste, chacun portant une atmosphère qu'il va confronter à l'autre. La chorégraphie des combats nous régale par son lyrisme, notamment lors d'un duel qui tourne au tango sensuel et lors d'une bataille rangée rappelant un ballet.
La charge sentimentale que certains trouvent absente du contenu narratif est entièrement suggérée par l'aspect plastique qui réussit à tenir l'ensemble du film par son audace. Le formalisme, dit "excessif", pourrait devenir kitch (notamment lors des ralentis) mais on se laisse porter par le parti pris de ne montrer que l'essentiel et d'évacuer les aspects secondaires qui paraitraient s'amener par des explications intrusives. Ce qui ne veut pas dire que certains reproches ne sont pas pertinents (personnage "émo-gothique" caricatural, séquence de combat inutile à la fin car les problèmes sont déjà résolus). On frôle parfois le grotesque mais l'on y tombe jamais car, sans aller jusqu'à l'humour franc, la légèreté de ton vient nous rattraper avant, nous rappelant que tout cela est volontaire, maitrisé, et qu'il ne faut pas le prendre trop au sérieux mais se laisser captiver par la grâce du spectacle.