Lorsque j'avais vu ce film la première fois, je pensais voir un nanar des années 80, un film totalement kitsch et sans intérêt. Et j'avais trouvé ce film long, vieillot et incompréhensible. Après plusieurs années j'ai du pourtant me rendre à l'évidence. Non seulement le film est culte pour beaucoup, mais, en plus, il a été réalisé par un très grand réalisateur, un géant même, David Lynch. Je me suis donc mis en tête de le revoir afin d'essayer de contredire mes premières impressions mais je n'ai pas réussi.
Désespérement vieillot...
Force est de constater que ce film a pris un coup de vieux. Que ce soit le grain du film qu'on croirait incrusté par les longues scènes sur Arakis, la planète désertique, que ce soit les costumes et les décors, qui ne vont pas, tout contribue à rabaisser Dune à un quasi nanar alors qu'il déborde d'ambition et de bonnes idées. Puis, soyons honnête, Sting en slip bleu plissé, rachitique, ça le fait vraiment pas. Je sais que cette époque était une époque étrange mais tout de même. Ça a mal vieilli. Le brushing de Paul et son visage inexpressif, ça m'agace. De même que des gros clichés et autres facilités narratives : Paul tombe amoureux d'une fille qui le tient plus ou moins en joug, et une minute plus tard, on les voit s'embrasser. Cette précipitation narrative est contrainte tant il y a raconter en si peu de temps de films. Lynch compacte tout. Les grandes familles sont à peine esquissées, les motivations des personnages demeurent troubles (si ce n'est la cupidité et le pouvoir). Et il a recours tellement aux voix off, dans les pensées des personnages, pour appuyer ses effets et éclairer les intentions des personnages que cela alourdit le style du film.
Les vers à l'inverse sont impressionnants et pas mal de scène sur Arakis sont remarquables. J'ai beaucoup aimé également certains clins d'oeils à l'art, aux empires antiques (Perses, Babyloniens, que l'on retrouve dans les mosaïques du palais des Atréides, nom grecque qui plus est) mais ces références, superbes pour le coup, et pointus, se noient dans l'étrangeté et l'iconoclasme de l'esthétique du film.
Un film qui oscille entre grand public et SF pointue
Je n'ai pas bien saisi le parti pris du film. Cela s'explique peut-être par les difficultés de production de ce film et par les désaccords entre Lynch et les producteurs mais quoi qu'il en soit, le scénario est parfois lisse et simple et parfois très compliqué. Les conflits politiques entre les grandes familles sont à la fois passionnant et résumé en quelques secondes, ce qui achève de perdre le novice qui n'a pas lu les livres. Pour quelqu'un comme moi, qui n'a pas lu le livre, entendre des dialogues obscures où l'on te cite quatre planètes, des noms d'objets curieux et des coutumes extraterrestres c'est un peu trop. À côté de cela, il y a énormément de raccourcis et de simplifications. L'élu est déjà "élu" depuis le début. On rabâche et on insiste lourdement sur les indices pour le faire deviner au spectateur. Du coup, le film apparait une fois de plus bancal, oscillant entre deux postures narratives, la production hollywoodienne, simple et efficace, ou, au contraire, le film d'expert, un peu geek SF sur les bords, remplis de références. Et pour cause, l'univers de Dune est passionnant. L'intrigue politique rappelle de grands moments de notre histoire, et s'avère complexe, ambiguë et réaliste. Les rivalités entre différents groupes ethniques aussi. Mais, à certains moments, le film doit tout simplement passer outre ces détails. En gros, il amasse beaucoup de choses, dit beaucoup mais n'explicite pas toujours et se perd parfois dans la simplification. Dommage, car, l'univers décrit est vraisemblablement un univers beaucoup plus abouti, mûr, complexe que celui de Star Wars par exemple.
Lynch en gestation
Pourtant, comme je l'ai déjà souligné, tout n'est pas à jeter dans ce film. Je noterais la superbe bande-son, totalement dans son élément, à part quelques moments à la guitare électrique assez moches, les multiples références culturelles, très riches et passionnantes (dans les costumes, les décors, l'architecture...). L'univers est à mon sens très intéressant. L'histoire sur fond d'intrigue politique est complexe et ça fait plaisir. On peut dire que Dune se veut un film fleuve sans y parvenir pleinement. Le film déborde d'ambition, à la fois science-fiction, récit initiatique, intrigue politique, drame dynastique antique, récit de l'ascension d'un peuple et de la naissance d'un chef, faisant la morale sur la cupidité,la guerre, et la folie et proposant un univers vaste et très décrits, mais, la tâche paraît trop immense. Le refus de trancher, d'éluder, de choisir fait que le film est bancal, kitsch, vieilli prématurément. Non définitivement, il y a quelque chose, au-delà de toutes les qualités du film et de son potentiel, qui me dérange. Lynch, néanmoins, avec ce film, a forgé une partie de son style, et a aussi su se faire remarquer. Finalement, peut-être ce film était-il nécessaire, pour que Lynch devienne ce qu'il est devenu. Et ne tirons pas de boulet rouge : Dune reste une des oeuvres les plus difficiles à adapter au cinéma et ce gars-là s'y est attelé avec acharnement. Respect.