J'ai aimé le Dune de 2021, malgré déjà des défauts scénaristiques importants :
Si Villeneuve y faisait beaucoup de sacrifices, s'empêtrant dans la nécessaire présentation d'un univers immense, le film trouvait sa grandiloquence à travers la multiplicité de ses personnages, un travail colossal sur le son, la musique, la lumière et la photographie. La tragédie des Atréides n'en était que plus belle, mais tout dans ce premier opus appelait une suite clôturant cette histoire ô combien classique de récit initiatique et de vengeance.
Le Kiff c'est maintenant :
Trois ans plus tard, Dune - Partie Deux écrase à nouveau par sa qualité technique (à la manière du dernier Avatar de Cameron) dix ans de blockbusters fades et insipides. Mais nous sommes déjà allés sur Arrakis, et la claque technique ne suffit pas. Si on est à nouveau surpris, c'est par l'habileté de Villeneuve de proposer des plans d'action toujours mieux pensés (la scène d'ouverture avec les Harkonnen en lévitation, l'attaque de la raffinerie, l'arrivée de Paul dans le sud...), toujours plus beaux, en les plaçant cette fois au service de l'action. Les décors sont encore plus impressionnants que dans la première partie.
Dans le désert, on repart de zéro :
Pour autant, dans une première heure très mal rythmée (on dirait qu'il manque des passages entiers), de nouveaux personnages, de nouveaux lieux nécessitent de nouvelles présentations et de nouveaux enjeux qui perdent un peu le spectateur, lui qui pensait voir moins de paroles et plus de castagne. Certains adhéreront à ce rythme, auquel le Blockbuster nous a mal habitué, d'autres se perdront dans la multiplication de ces grands acteurs venus pour réciter une ou deux lignes. Cette partie retrace l'ascension de Paul chez les Fremen, mais est complètement ratée à mon sens, car on ne sent jamais le personnage progresser, ou gagner en charisme. À ce titre, le jeune Chalamet est définitivement très mal casté...
Bad Guy, blague et bastons :
Fort heureusement le film ne nous permet pas l'ennui, et une fois les compétences de la vie dans le désert acquises et maitrisées (elles auraient mérité un film à elles seules), une magnifique séquence en noir et gris vient réintéresser le spectateur, avec la présentation d'un nouvel antagoniste ultra charismatique. Les enjeux s'accélèrent, comme si on regardait uniquement les 10 dernières minutes de chaque épisode d'une série (Game Of Thrones, pour ne citer qu'elle), mais tel le ver fonçant dans le désert, on est happé par cette tragédie en marche, les enjeux des personnages secondaires perdant peu à peu en intérêt. En plus de l'action croissante, quelques séquences quasi humoristiques et plus largement une critique de la foi et de ses dangers sur les masses et les "faibles, ceux qui ont peur" est à noter, bien moins détaillée que dans le livre.
L'important c'est le message :
Si le final est classique et attendu, l'important c'est le voyage, et en cela le message de Frank Herbert et tout l'intérêt de Dune est malheureusement distordu, Villeneuve faisant de sa fable une tragédie grecque (mort du père, mariage forcé, impunité du destin) et de son héros un sauveur judéo-chrétien encore loin de devenir la cause de tant de mal dans la galaxie. À ce titre, le fait de ne jamais énoncer le mot "Jihad" dans un film Dune est assez énorme...
Je suis finalement partagé à la fin de cette critique. Si le vent d'auteur qui souffle sur les Blockbusters (Barbie, Dune 2, Batman et Oppenheimer sont les meilleurs démarrages au cinéma de ces deux dernières années) est bienvenu et permet de voir moins de CGI dégueulasses et de scénarios robotisés, je valide, mais l'expérience en elle même m'a déçu dans sa gestion du rythme et son absence d'innovation d'écriture. Un troisième opus est apparemment en route, il se rapprochera peut être enfin des vrais sujets de l'immense livre qu'était DUNE.