Dunkerque de Christopher Nolan est un film à regarder au cinéma, comme de nombreux autres films des années 2010 qui, pour cacher une certaine vacuité de scénario, nous donne à voir de fantastiques prises de vue. Il faut être honnête, ce film est dans ce domaine là une franche réussite. Cependant, il a du mal à nous couper le souffle, à défaut, il nous époustoufle techniquement. Le film est tri-dimensionnel : une semaine sur les plages, un jour sur la mer et une heure dans les airs. Ce méli-mélo nous permet de voir des plans d'une beauté et d'une technique réellement réussis, débarrassés du kitsch et du superflu. Du coup, cela comporte un bémol de taille : ce film ne peut se voir qu'au cinéma, ou sur un écran particulièrement coûteux, car le regarder sur son pc ou sur un ordinateur affaiblirait ce côté qui est le sel du film. Là où le film est également plaisant, c'est qu'il ne cède pas à la manie du sacro-saint héros anglo-saxon et que les personnages, dans toute leurs horreurs, peuvent nous permettre de nous identifier. Ce n'est pas un homme qui est mis en valeur, c'est la foule et uniquement elle, cette masse de soldats aux visages inconnus mais pourtant si proches de nous par leur jeunesse et leur vie. De plus, le lieu de tournage, Dunkerque, est particulièrement bien exploité, notamment les plans sur la plage ou du début sur la ville. Il est sensible, et c'est pour cela que le film n'est pas raté, que Christopher Nolan a une passion pour cet épisode historique, et il nous le rend avec une efficacité et une virtuosité qu'il serait affreux de contester.
Mais voilà, ces éléments positifs sont contrebalancés par des éléments réellement négatifs, dont le premier, et ce n'est pas de moindres, est l'absence des Allemands à l'écran. Ce n'est peut être pas le sujet, mais ces balles qui sifflent, ces avions qui bombardent, nous font l'effet d'un bourrage de crâne à la sauce 1914. La Wehrmacht n'est pas une armée de robots sans coeur, et le film aurait gagné à les présenter de manière toute aussi humaine que les Anglais et les Français (quant aux Belges ils sont portés disparus). Cela aurait permis de dépasser les traditionnels clichés caricaturaux de l'Allemand à l'accent choucroute, blond aux yeux bleus, pro-nazi et froid. On peine également à cacher notre frustration quant au manque énorme de dialogues, ce qui est tout de même du plus important. Il peut être louable de vouloir réduire le parlé au minimum pour montrer la réalité la plus crue au spectateur, mais cela renforce le côté documentaire et le côté un peu "blockbuster" du film. Le dernier point, et pas des moindres, est tout simplement l'inutilité des scènes d'aviation qui là encore, sont faites pour impressionner sur le plan technique et n'ont aucun intérêt scénaristique.
Pour résumer, ce n'est pas très virevoltant. On peut même s'ennuyer. Cependant, ce film gagne à être vu, il n'est pas une arnaque ou un blockbuster insupportable. C'est une proposition de vision d'un évènement historique d'une grande intensité. Ni tout à fait reportage, ni tout à fait film, c'est un docu-fiction original mais pas exaltant.