Mi-pamphlet, mi-fable, Effacer l'Historique assaille ses trois héros de démarchage téléphonique, notifications, abonnements oubliés et autres uberisations de l'intimité.
Dans une ère post-gilet jaune et pré-covid, les échoués de la France pavillonnaire sont des punching-balls du surendettement, de la quête du meilleur prix, de la disparition de l'humain et d'un travail qui humilie le prolétaire en déresponsabilisant l'employeur. Le script multiplie les scénettes s'attaquant méchamment à l'absurdité de nos relations humaines, commerciales ou intimes, que la numérisation des échanges favorise. Tout ça, le film le rend très bien et construisant une farce absurde sur des éléments très réels.
Blanche Gardin, Denis Podalydès et Corinne Masiero sont chacun très convaincants dans un registre qui est le leur, dans une zone de confort. Le soucis est que la situation est souvent plus importante que le personnage. Ce qui en fait des coquilles vides auxquelles on ne croit qu'à moitié, malgré le tragique de leur destin. L'impression n'est pas aidée par des dialogues un peu fades.
Blâmant à tour de bras le pire d'une pseudo-modernité, Kervern et Delépine n'en oublient pas de jouer aux vieux cons par moment aussi, notamment quand ils dénoncent plus la technologie que son utilisation, parlent de la jeunesse ou de l'omniprésence du divertissement.
Filmé avec des procédés presque artisanaux donnant des plans surprenants, en bien comme en mal, Effacer l'Historique n'en reste pas moins un témoignage grinçant de 2019 avec quelques rires jaunes qui valent le coup.