A voir les retours dithyrambiques sur ce thriller politique, on en vient à culpabiliser de ne pas être au diapason de tous ces éloges. Le réalisateur Rodrigo Sorogoyen nous avait pourtant passionnés avec son thriller « Que Dios nos perdone », film policier tortueux et implacable. Film qui mettait déjà en scène l’excellent acteur Antonio de la Torre, tout aussi bon en politicien véreux ici, et qui s’avérait pour le moins complexe mais compréhensible. Ici, en toute honnêteté, mettons au défi quiconque de comprendre l’entièreté de l’intrigue. Pire, celle de « Que Dios nos perdone » semble presque basique comparé à celle de « El Reino ». Donc en dépit de qualités certaines, comment être captivé par un long-métrage où l’on ne comprend strictement rien à l’histoire et où rien n’est fait pour en faciliter la lisibilité ?
Si les grandes lignes de l’intrigue nous apparaissent petit à petit, difficile de saisir les détails d’une narration qui va à cent à l’heure, nous abreuve d’une multitude de personnages et de noms qu’on ne peut retenir ou encore se plaît à laisser de nombreux points en suspens. Ajouté à cela, de nombreuses zones d’ombres et un dénouement pour le moins abrupt, il devient vraiment difficile de trouver aimable ce thriller politique qui finit par apparaître très prétentieux. Pourtant le fond du sujet est passionnant, ruant dans les brancards d’un système corrompu jusqu’à la moelle. Il est clair que la chose politique ainsi que les médias en prennent plein la tronche, notamment avec le final délectable sur le plateau de télévision en forme de duel verbal entre le héros et une journaliste. Ce qui aurait donc pu être passionnant, jouissif et politiquement incorrect devient aussi et surtout laborieux et pénible pour le spectateur.
Et c’est vraiment dommage et frustrant car la mise en scène est virtuose. L’énergie de celle-ci est dingue, la caméra colle littéralement aux basques du personnage principal et ne s’embarrasse d’aucune longueur (même si paradoxalement le film peut paraître long puisqu’on ne comprend pas toujours tout), filmant tous ces politicards comme dans un film de mafia. Une réalisation entre chic, paranoïa et état d’alerte maximum enveloppée dans une musique techno du meilleur effet qui ajoute à l’état d’urgence ressenti par le protagoniste principal. La seconde partie est plus prenante car elle laisse un peu les rouages obscurs du scénario (et de la politique) de côté pour se focaliser sur l’aspect thriller avec une certaine tension et quelques séquences de haute volée (la villa, la station-service et le plateau télé). Mais il est trop tard : plus d’une heure de film où on se retrouve dans le flou total à lutter pour saisir ce qui se passe et qui a fait quoi et pourquoi condamne directement notre appréciation de « El Reino ». Prétentieux et bien trop complexe, à croire que la critique dispose d’une intelligence que le spectateur n’a pas toujours ou qu’elle se concentre uniquement sur les aspects réussis pour faire bien.
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