Lars, décidément, on va pas rester copains bien longtemps. Je déteste autant tes débuts que tes derniers films. Pourtant, ils n'ont pas grand chose en commun. Element of crime, ton premier long, est une énigme pour moi – je parle de l'intérêt qu'il peut susciter – d'autant qu'il m'a quand même coûté une méga migraine et 400 mg d'Advil, comme ton enquêteur. Dommage de déployer autant d'énergie pour si peu de choses : esthétiquement, pour tout cinéphage de la pire espèce, ton film est un pur moment de bonheur. C'est beau, chiadé, graphique, expérimental et malheureusement extrêmement bavard et ennuyeux, lorgnant de façon pitoyable vers le cinéma de Godard, époque Alphaville… en beaucoup plus chiant. C'est bien simple, ton film s'adresse à des étudiants qui viennent de lancer un ciné-club à la fac de Jussieu ou les spectateurs n'osent ni tousser ou soupirer de peur de s'attirer les foudres des 3 boutonneux qui bavent devant cette pseudo enquête au rythme trépident (je rigole, on s'ennuie ferme !). Celui qui aurait la mauvaise idée de sortir (même pour pisser), prend définitivement le risque de se faire lyncher ou d'être radié de la lucarne. Bien sur, l'histoire se tient : Fisher, pour résoudre l'énigme du meurtrier au loto prend le risque d'expérimenter des méthodes controversées d'un théoricien suicidaire, l'auteur du fameux “Element Of Crime”. Il pourra ainsi s'identifier au tueur et le démasquer au risque d'en devenir un, c'est l'aspect discutable du précepte. Nous voilà spectateurs dociles de cette remontée dans le temps étrange (en obligeant Fisher à reproduire le parcours du tueur) et si tu n'avais pas lâché (pas toi, le freluquet bonehead) en plein cœur de ton intrigue “I'am gonna fuck U back to Stone Age”, j'aurais trouvé tout cela totalement factice et beaucoup trop sérieux alors merci pour ce bref moment d'hilarité. Toute ton histoire est alambiquée et passionnante… Sur le papier ! Encore faudrait-il des ruptures de rythme, un climax, un twist, des ressorts scénaristiques pour nous captiver. Jamais un tel traitement linéaire n'avait donné autant le sentiment de porter préjudice à la forme, magnifique : une Europe méconnaissable, en décomposition, pluvieuse et moite, anachronique. Putain, je vais devoir prendre un autre Advil, tu m'as encore foutu en rogne.
Yeahmister
3
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste 39 Films sous le coude

Créée

le 1 janv. 2015

Critique lue 882 fois

4 j'aime

Yeahmister

Écrit par

Critique lue 882 fois

4

D'autres avis sur Element of Crime

Element of Crime
Moizi
6

Fils malade

Dès le début du film ça m'a marqué, ce ton sépia, ça me rappelle vraiment Stalker... Et puis à un moment ça m'a frappé, il filme une statue, je ne sais plus quoi, sans doute un vierge à l'enfant et...

le 11 nov. 2014

16 j'aime

1

Element of Crime
denizor
6

Critique de Element of Crime par denizor

Parler d'Element of crime n'est pas chose facile. Essayons tout de même, au risque de nous perdre autant dans cette critique que dans le film lui-même. Partant d'un postulat de film noir (une...

le 27 sept. 2018

10 j'aime

Element of Crime
candygirl_
8

Sin City 0.5

Au-delà du titre relativement ésotérique que porte le premier long-métrage de Lars von Trier, The Element of Crime est avant tout l’appellation d'un ouvrage fictionnel traitant de l'approche du...

le 25 nov. 2023

6 j'aime

2

Du même critique

Some Deaths Take Forever
Yeahmister
10

Critique de Some Deaths Take Forever par Yeahmister

Moins connu que Jean-Michel Jarre, mais beaucoup plus intéressant, le Grenoblois Bernard Szajner, né en 1944, est une figure mythique de l’électronique expérimentale française. Il restera d’abord...

le 16 sept. 2012

17 j'aime

1

Holy Motors
Yeahmister
10

Critique de Holy Motors par Yeahmister

Après l'immense déception qu'était Pola X, film à la limite du grotesque, je n'attendais plus grand chose de Carax dont je plussoie Mauvais Sang, son chef-d'œuvre. Si Holy Motors parait aussi...

le 28 déc. 2012

15 j'aime

Drums and Wires
Yeahmister
10

Critique de Drums and Wires par Yeahmister

Groupe méconnu du sud-ouest de l’Angleterre, XTC fait son apparition dans les eighties, assurant les premières parties de Police dans l’indifférence générale. Et pourtant, Partridge allait signer...

le 1 mai 2014

13 j'aime

6