Bon, c'est pas la folie, il n'y a rien de très original ici, ni de très créatif.
Mais tout de même de quoi passer un bon moment.
Toujours cette question du clone qui ne sait pas qu'il l'est, avec en plus un questionnement intéressant sans plus sur l'amour, doublé d'une réflexion sur l'hypothèse: l'imitation, c'est moins cool que la réalité ou du moins, c'est autre chose (merci Platon).
Wahou.
Par suite une critique de cette critique de l'imitation - on va finir par s'y perdre - avec le vieux qui joue à tuer pour se venger de sa déception.
Ici, cela devient - un peu - intéressant.
Question pour le docteur: pourquoi dévaloriser l'imitation, à la manière des platoniciens? Pourquoi tuer Elizabeth Harvest n°2, n°3 etc?
Réponse du vieux platonicien: parce qu'elle n'est pas à la hauteur de la réalité (qui elle détient la vérité - ici, l'amour). En gros, elle n'a pas d'âme. Suite logique: puisque l'imitation vaut moins que la réalité et n'est pour nous que déception, autant la supprimer sans chercher à lui trouver de qualité autre que celles qu'on voulait y trouver en la créant (faudrait pas s'attacher, c'est comme les chatons!). Et puis c'est quand même super kiffant de tuer des meufs.
Analyse du platonicien par un nietzschéen ou un freudien (avis du scénariste): Mon cher, vous êtes dominé par votre ressentiment à l'égard de l'imitation, vous vous laissez submerger par votre déception et par votre obsession de cet amour perdu, que vous transformez en haine. C'est très vilain.
Et l'idée finalement c'est: l'imitation elle aussi a une âme, qui n'est peut-être pas la même que celle de l'original, mais une âme tout de même. En gros, elle mérite d'exister elle aussi, simplement parce qu'elle en a envie. (on n'est donc pas dans une perspective aristotélicienne du "l'imitation c'est cool parce que ça donne de la connaissance": on va pas disséquer le clone. C'est plutôt l'inverse même puisqu'ici c'est la connaissance qui crée l'imitation. On est plutôt dans une perspective post-chrétienne du style "tout être humain, même un clone, a le droit de vivre et a un destin particulier" - déjà-vu!).
On a aussi un semblant de réflexion sur l'hérédité, sur la toxicité des personnes de grande volonté et de génie sur leur entourage, la jalousie, la curiosité. Bref, rien de très fou.
Plutôt sympa, donc, à regarder: un scénario qui a défaut d'être créatif, n'est pas ennuyeux, et une esthétique correcte mais évidemment quand le scénario n'est pas fou l'esthétique ne peut pas grand chose pour le film, et celle-ci reste très classique, avec beaucoup d'effets d'ombre.
J'ai toutefois aimé le moment où Elizabeth se regarde dans la glace et embrasse son reflet, cette scène est riche et sensuelle. Je ne sais pas si c'est une scène absolument originale ou si elle s'inspire d'un autre film - je me méfie un peu vu que tout le reste du film est déjà-vu -, mais elle m'a paru si évidemment juste à propos du sujet, que rien que pour elle, ce film vaut le coup d'être vu.
Ajout quelques mois plus tard:
J'étais passée à côté de quelque chose d'intéressant.
Le personnage de l'héroïne est décliné, avec, une réflexion féministe (un peu trop discrète) en fond.
Toutes les femmes qui n'obéissent pas à l'homme doivent mourir.
Toutes celles qui meurent sont des potiches, des faibles qui ont pour trait commun de croire en l'amour!
La seule qui survit non seulement n'obéit ni au docteur, ni à son fils, mais en plus trouve le moyen de devenir plus fort qu'eux.
Bref, une réflexion sur le comportement des hommes avec les femmes, et aussi une réflexion sur le comportement des femmes avec les hommes. Encore une fois, rien de très original, mais bon, c'est pas mal tout de même!
L'homme est un loup pour l'homme? Et la femme dans tout ça?