Muriel Bayen (Sandrine Kiberlain) a la réputation d’inventer des histoires loufoques à tout bout de champ. C’est au point que son avocat ne la croit pas lorsqu’elle se décide à lui raconter la vérité. Visiblement il connaît Muriel et sera chargé de défendre ses intérêts dans une sale histoire. Elle est dans le collimateur de la police, suite à la disparition de Julie, la compagne du chanteur Vincent Lacroix (Laurent Laffite).


Le titre du film aurait pu être un élément de suspense. Elle l’adore. Qui, quoi ? Son fils, son chien (mais elle n'en a pas), sa patronne ? Ce n’est pas une révélation, celui qu’elle adore c’est Vincent Lacroix. Mais attention, c’est une fan, pas le genre groupie hystérique. On la voit dans la première partie du film assister à un concert où elle chante et se trémousse gentiment. Certes, quelques années auparavant, elle campait régulièrement sous les fenêtres de son idole, mais elle restait dans sa voiture. Bref, Muriel est une esthéticienne passionnée par Vincent Lacroix à peu près comme elle l’est par son métier. Et ses histoires n’ont pas plus d’importance que ce qu’elle annonce à propos d’une cliente qu’elle et ses collègues fuient quand elles le peuvent « Elle pue, c’est comme ça, un jour il faudra bien que quelqu’un lui dise ».


Allez savoir ce qui passe dans la tête des gens et comment ils réagissent aux gros ennuis. Pour Vincent Lacroix, ce qu’il faut comprendre, c’est qu’il est doté d’un ego démesuré. C’est un chanteur de variété habitué à être l’objet de l’admiration des autres. Son premier admirateur ? Lui-même bien-sûr. On le réalise en l’observant jouer au poker un soir chez lui. Non seulement on n’entend que lui, mais il se permet de commenter son attitude par rapport à celles des autres (qui subissent). Autre personne qui subit son attitude, sa compagne Julie qui tente de regarder la télé à quelques mètres. Vous savez combien il est difficile d’apprécier quelque chose quand il y a du bruit juste à côté. Le comble est atteint quand Vincent demande à sa compagne de baisser le son. Dans ces conditions, comment s’étonner qu’il y ait des disputes ? Malheureusement, celle qui suit dégénère et Julie meurt sur le coup. Vincent perd alors les pédales. Disons que son comportement emprunte une certaine logique, puisqu’il débarque en pleine nuit chez Muriel qu’il ne connaît que de tête, sachant qu’elle assiste régulièrement à ses concerts et sorties publiques (au premier rang des spectateurs sur le plateau de Michel Drucker) et parce qu’il a conservé certains de ses courriers. Il lui demande de l’aide. Vincent Lacroix demande de l’aide à Muriel Bayen ! De son côté, elle n’en croit ni ses yeux ni ses oreilles. Du coup, elle accepte tout sans discuter. Elle filera en Suisse chez la sœur de Vincent, lui présentera le courrier que Vincent a rédigé à son intention, la laissera accomplir la suite du plan de Vincent puis, au bout d’une heure environ, reprendra la route comme si de rien n’était, sans chercher à savoir ce qu’elle est allée faire si loin au pied levé.


Tout cela est bien beau, mais ne laisse aucune place pour l’imprévu. Or, de l’imprévu il y en a toujours. On se doute bien qu’avec Muriel qui improvise facilement les histoires les plus improbables, tout est possible. Le film s’attache à montrer qu’avec un petit grain de sable dans la mécanique, un train peut dérailler.


Le film se laisse voir, mais il déçoit un peu. Le début laissait espérer un scénario reposant sur la manie de Muriel d’inventer des histoires improbables. Or, la réalisatrice se plaît à décrire la situation qui va mener Vincent et Muriel dans un imbroglio. Dans un premier temps, le personnage de Muriel ne prend pas l’épaisseur qu’on pouvait attendre, puisqu’elle se comporte en fan connaissant sa place et jouant son rôle. La réalisatrice, Jeanne Herry étant la fille de Julien Clerc et Miou-Miou, on ne se demande pas où elle a cherché l’inspiration pour ses personnages. On sent que ce qui l’intéresse, c’est de mettre en place une intrigue policière mettant en évidence les relations entre une célébrité et une fan. Pourquoi pas, malheureusement le résultat manque singulièrement d’originalité, malgré le sourire de Laurent Laffite. Là où ça devient intéressant, c’est quand l’enquête met en évidence que les choses ne se sont pas passées exactement comme on pouvait le supposer d’après ce que la réalisatrice avait bien voulu nous montrer. Avec certaines informations et faits nouveaux, on réalise que Vincent et Muriel vont avoir du mal à s’en tirer indemnes.


L’intrigue policière prend donc pas mal de place dans le film, trop à mon goût. Je constate que le potentiel évident de Sandrine Kiberlain pour la comédie (voir sa prestation dans 9 mois ferme) est ici incroyablement sous-exploité. D’ailleurs, la réputation de Muriel comme raconteuse d’histoires n’est soutenue que par quelques scènes anecdotiques, alors qu’il y avait matière à agrémenter le scénario, dans son comportement au travail par exemple. Et si l’attitude de Vincent après le drame est absurde (du moins vu de l’extérieur, en spectateur), faisant de lui un banal calculateur cherchant à préserver son image, on peut regretter qu’un fait non négligeable (ses premiers cheveux blancs, après le drame) reste assez anodin. Voir comment il s’arrange pour retrouver sa chevelure uniformément brune aurait donné davantage d’épaisseur à son personnage et l’aurait rendu plus humain.


Parmi les points positifs, les réactions improbables des différents personnages face à l’imprévu, comme ce conflit qui couve longtemps entre deux des enquêteurs (Pascal Demolon et Olivia Côte), parce que lui, amoureux, sait que sa compagne a le feu aux fesses et que sa volonté de changer n’y fera rien. Une des meilleures répliques du film vient quand il dit « Tais-toi ! » alors qu’il est face à celui qu’il cherche désespérément à faire parler. Qui sait ce qui se serait passé s’il avait réagi en professionnel mettant ses sentiments personnels en veilleuse ? Enfin, il est assez jubilatoire (enfin !) de voir Muriel retourner complètement l’argumentation de l’enquêteur la plaçant devant un indice qui la met directement en cause.


Et le peigne de Tina Turner dans tout ça ? L’hypothèse est qu’on le lui aurait subtilisé dans sa loge un soir de concert. Quel rapport et quel intérêt me direz-vous ? Tina Turner n’a pas porté plainte et elle est bien vivante, citoyenne Suisse depuis 2013. Les histoires de Muriel…

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le 22 sept. 2014

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