Les histoires d’amour finissent mal, en général. Particulièrement celle de Vincent Lacroix (une sorte de Patrick Bruel de fiction) et de sa compagne : la jeune femme ne ressortira pas vivante d’une énième scène de ménage. Une mort accidentelle mais qui, à l’image du sang sur le tapis, a de quoi entacher la carrière d’un chanteur joli-cœur. Le crooner de bande FM ne réfléchit pas deux secondes avant de se mettre au pipeau, élaborant un scénario pervers pour se débarrasser du cadavre encombrant. Un projet dans lequel il implique Muriel, sa plus grande fan attitrée, celle qui est de tous ses concerts et qui a tous ses posters. L’esthéticienne, trop contente de cet égard, accepte de l’aider sans poser de question.
Un tel pitch, entre les quatre mains des frères Coen, ferait des étincelles. Sous la caméra de Jeanne Herry, il se contente de scintiller par moments, et c’est déjà pas mal. Elle l’adore est un film gentiment amoral. Amoral, car on ne peut s’empêcher de souhaiter que Muriel réussisse sa mission. Gentiment, car l’invraisemblance assumée de l’intrigue nous évite de culpabiliser de ne pas avoir l’esprit encombré de considérations éthiques sur la complicité de dissimulation de corps.
La comédie empiète progressivement sur le polar, en suivant un canevas proche d’un Columbo déviant. On connaît le coupable et sa comparse, on les regarde (dé)monter leurs alibis respectifs, mais on espère que les enquêteurs se montreront au final moins sagaces que Peter Falk. Laurent Laffitte est particulièrement savoureux en chanteur égocentrique et salopard, un personnage à gifler. Sandrine Kiberlain, elle, confirme après Neuf mois ferme et, dans une moindre mesure, Pauline détective, que la comédie lui sied. Sans forcer le trait, elle joue une fausse ingénue magnifique. Elle, on l’adore.