" C'est comme pour la cigarette, c'est difficile d'arrêter ..."
Avec ce film, la réalisatrice nous livre son propos cru (très cru, peut-être même trop) , réaliste et prenant sans aucun tabous mais d'une façon qui ne laisse pas indifférent. Les plans sont méticuleux et travaillés, s'arrêtant souvent sur un détail ,zoomant sur le banal pour en faire un objet d'art.
Mais là où le film est le plus juste c'est dans son propos même, chronique de la brutale réalité à laquelle la souriante, riche et talentueuse (un peu agaçante aussi) journaliste, interprétée avec talent par Juliette Binoche, est confrontée.
Partie pour un simple reportage, elle revient hantée par les images et les souvenirs de ces deux filles, au parcours similaire, la prostitution, mais dont les univers divergent pourtant. La première est brune, refuse la banalité et donc se conforte dans l'idée que son coprs monnayé lui permet d'échapper aux plulls mal taillés et aux meubles conforama (une scène dans sa famille suffit à comprendre sa situation), elle confira "c'est comme pour la cigarette c'est dur d'arrêter" . L'autre blonde, polonaise séductrice et perdue, qui se noie dans des litres de vodka, elle finira par faire danser Binoche après quelques verres, mêlant leurs coprs dans un flou merveilleux.
Ainsi, ces filles désirent l'argent et le confort, elles héritent des pires vices humains, des pires humiliations en trouvant cela "facile", sauf quand la réalité les rattrapent trop vite. Pourtant, elles sourient toutes à la caméra de Juliette Binoche à Anais Demoustier, exceptionnelles ici bien que dans des rôles assez risqués.
Les femmes se sourient , nous sourient dans des plans ensolleillés ou dans le confort illusoire d'un grand appartement. Cependant, les scènes s'enchaînenent et on ne sait jamais vraiment où est l'intérêt de créer autant de gêne par moment et la volonté de contraste avec la vie de Binoche, un peu inintéressante à vrai dire, est trop marquée limite caricaturale...
Bref, la vie de Juliette Binoche bascule, loin de son confort et de son bel appartement où elle écoute de la musique classique et tente d'élever ses deux garçons tout en gérant ses conflits avec son mari. Elle dérive peu à peu jusqu'à fuir, rapidement, furtivement, une des plus belles scènes (la seule ?) nous est réservée dans le dernier quart d'heure du film.
En somme un film trop cru mais surement nécessaire, très sincère et parfois touchant mais qui reste imparfait et peu accessible. Il dérange trop, on est souvent à la limite de la pornographie et il y avait surement un autre moyen de raconter que celui choisit par la réalisatrice qui certes veut choquer et dénoncer mais qui fait finalement trop détourner les yeux. C'est globalement maladroit.
Il révèle une société de la consommation, de la volonté du confort, de jeunes qui, malgré leurs études, ne croient plus en l'avenir. Une vie du profit qui pousse au pire, à l'irrespect même de son corps (la caméra est toujours à distance comme pour livrer le pire sous couvert de d'une forme de retrait, d'observation froide).
Finalement, tous regardent plus ou moins des pornos sur leurs ordis, sans savoir quelles jeunes filles croisées dans le métro subissent leurs désirs inassouvis.
Une de ces objets cinématographiques non identifiés qui restent pour un moment et changent nos regards tout en les dérangeant fortement. Avis contrasté donc, surtout au second visionnage (pur hasard) qui bizarrement est beaucoup moins bien passé que le premier. Je ne pense pas avoir envie de le revoir un jour...