Prêtes à tout pour étudier
Souhaitant attirer l'attention sur un véritable phénomène de société trop peu connu des foules, la prostitution estudiantine, Malgorzata Szumowska a passé des années à étudier la question, recueillant des témoignages afin de donner corps à ce film.
Cette recherche documentaire se ressent durant le film, à travers les échanges entre Anne et ses deux témoins, toutes deux obligées de vendre leur corps pour subvenir à leurs besoins. Le souci principal du film se trouve d'ailleurs là : dans cette constante hésitation entre un aspect documentaire pas toujours très bien maîtrisé, et constitué des entretiens filmés caméra à l'épaule, et une mise en scène plus conventionnelle et véritablement cinématographique. A force de balancer entre les deux, la réalisatrice perd parfois le spectateur, ce qui est d'autant plus dommage que l'on ressent une véritable envie de travail du cadre à travers quelques plans esthétiquement sublimes.
Cet équilibre instable se retrouve aussi au niveau du scénario. Le quotidien des deux jeunes filles se mêle à celui, plus banal, de la journaliste. Cela fonctionne pour quelques scènes, mais le montage parait parfois un peu aléatoire et manque franchement de rythme au final. De même, la réalisatrice semble trop hésiter entre l'aspect sordide de la situation, et l'aspect revendiqué, presque jubilatoire, des actes commis par les étudiantes. En voulant trop nuancer son propos, elle perd le spectateur, qui a finalement du mal à se projeter dans les personnages.
C'est d'autant plus regrettable que le trio d'actrice est excellent. Anaïs Demoustier et Joanna Kulig s'en sortent plutôt bien dans deux rôles difficiles, et Juliette Binoche incarne à merveille la bobo féministe, coincée et frigide. Le casting masculin est inégal, d'autant que les personnages sont souvent à peine esquissés.
Un film trop impersonnel, trop hésitant pour être vraiment bon. Il manque un choix tranché dans la mise en scène et peut être un propos moins nuancé. Dommage, le postulat de départ était intéressant et, mieux traité, aurait pu aboutir à un vrai bon film.