Il y a des thématiques récurrentes dans le cinéma de Baz Luhrmann et Elvis ne fait pas exception, rappelant Gasby Le Magnifique dans sa démesure ou Le Moulin Rouge pour la musique et la photographie. On y suit Elvis Presley (incarné par le brillant Austin Butler de son enfance à sa mort, à travers le récit de son manager (dont la catastrophique performance de Tom Hanks a besoin d’être soulignée tant notre viel ami a besoin d'une retraite). Images de concerts, de drogue et de contrats se succèderont pendant près de 2h40, sans répit de musique.


Je ne connaissais pas particulièrement Elvis Presley, qu’il s’agisse du personnage ou de son œuvre, mais on peut reconnaître à Baz Luhrmann qu’il réussit à transmettre de son personnage éponyme l’idée d'une bête de scène aux shows sexualisés et au style ultra dynamique en rupture avec l’époque. C’est déjà ça.


Le premier tiers est d’une grande richesse en terme de mise en scène, les plans ne durent pas plus de quelques secondes et s’enchainent sur un montage frénétique qui renforce la sensation d’ascension fulgurante de la star montante. Le travail du son est impressionnant, particulièrement inventif (je souligne notamment le son des flashs des appareils photos ou des pages de journaux). Chaque plan a une signification et Luhrmann s’amuse véritablement, à l’image de l'utilisation anachronique du rap sur des plans de Beal Street. C’est rythmé et on sent qu’il y a une patte de réalisateur derrière.


Les deux tiers suivant sont en revanche extrêmement décevants. On abandonne peu à peu la vie d’Elvis, notamment ses revendications politiques et raciales, pour se concentrer sur le colonel Tom Parker (le manager). Je peux comprendre qu’on s’intéresse à la relation malsaine qui lie les deux hommes et à quel point ce dernier s’est servi de lui pour ses intérêts, mais c’est ici très maladroit. Durant près d’1h30, Luhrmann nous servira en boucle la même bouilli tiède ; des scènes avec Tom Hanks (recouvert de mousse en latex jusqu'à le rendre méconnaissable) qui négocie des contrats d’exclusivité, entrecoupées de plans de concert reproduits à l’identique à partir des vidéos live. De la même manière que certaines personnes avaient critiqué Bohemian Rhapsody à sa sortie, il n’y a aucun intérêt à réaliser ce genre de scène. Si je veux voir son concert, je vais sur youtube et je vois le vrai Elvis. Ici, certaines scènes sont ces même concerts reproduits plan par plan avec Elvis en moins. Quel intérêt ?! On a compris au bout de 30 minutes que son manager se sert de lui pour ses intérêts personnels, on n’avait pas besoin d’un film de 2h40 sur ça? C'est tout simplement paresseux...


Cela m’énerve d’autant plus que Luhrmann nous montre dans le premier tiers du film sa capacité à faire bien mieux, mais que tout s’essouffle et s’étire inutilement. En plus de cela, il avait un super matériau de base, celui du combat des afro-américains à travers la musique dans ces années 60 traversées par l’assassinat de Martin Luther King et J.F.K.. L’histoire d’un blanc élevé à Memphis qui chantait la musique dite « nègre », qui a subi la censure des partis conservateurs, etc.. Luhrmann aurait vraiment pu en faire quelque chose de bien, mais il s’est contenté d’un biopic classique comprenant tous les poncifs habituels franchement barbants (à savoir la femme divorcée, la mort d’un des parents dans l’alcoolisme ou la drogue et la chute dans l’addiction de la star tant aimée).

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le 26 juin 2022

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Lian Yu

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