Embrassez qui vous voudrez par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Bertrand est un riche agent immobilier marié à Elisabeth, style bourgeoise futile, bon chic bon genre. Celle-ci, surmenée par très peu de choses, semble t-il, décide à la fin d'une soirée bien arrosée avec ses amis de faire un break en partant une semaine dans un grand hôtel de luxe au Touquet. Elle propose à ses amis de venir également profiter du bon air de la mer.C'est ainsi qu' elle sera rejointe par Jérôme et Véronique, un couple sans un sous, accompagné de leur fils Loïc. L'ancienne maîtresse de Bertrand et amie d'Elisabeth, Julie, est aussi du voyage en compagnie de son bébé. Emilie, la fille délurée de la maison, part en Amérique avec son petit ami Kévin, employé de Bertrand. Pendant ce temps, l'agent immobilier préfère rester à Paris, soi-disant débordé de travail. La compagnie de Réna, un jeune éphèbe androgyne, lui procure tout de même une certaine consolation. Le séjour au Touquet va se révéler très surprenant et semé d'embûches, d'autant plus que va se mêler à eux un couple également très atypique formé de Jean Pierre, jaloux maladif, et de Lulu, littéralement persécutée. Les vacances écoulées, chacun décide de se revoir à Paris chez Bertrand et Elisabeth pour une garden-party...


D'après un roman de Joseph Commolly, Michel Blanc porte à l' écran une belle et folle satire sur des couples qui, par leurs contextes sociaux, existentiels et culturels, n'ont apparemment pas de points communs. Et pourtant, ils vont se retrouver réunis et nous apporter la preuve que le bonheur et le malheur ne choisissent pas leur camp. Elisabeth et Bertrand ont de l'argent. Ils sont riches, blasés et l'un comme l'autre las de la vie qu'ils mènent, une vie où les sentiments ont depuis bien longtemps disparus. Jérôme n'a aucune envergure. Il adore peut -être sa femme Véronique mais n'a plus à lui offrir que la routine et parfois sa bonne volonté. Elle voudrait, comme ses amis, briller un peu et profiter d'une existence plus ambitieuse, mais rien n'y fait. Pour eux les vacances se passent dans une caravane et non au grand hôtel dont elle rêve. Leur fils s'ennuie de cette médiocrité ambiante et ne pense qu'à quitter ce milieu étroit. Quant à Jean-Pierre, archi complexé, il est marié à Lulu qu'il croit trop belle pour lui et pense sans cesse qu'elle lui échappe. Elle étouffe dans ce climat malsain et insupportable. Son désir de liberté et de tranquillité est immense face à cette suspicion permanente. Julie, depuis que Bertrand a décidé de ne plus être son amant, entichée d'un bébé infernal, cherche l'homme de sa vie sans pouvoir trouver son idéal. En fait, tant bien que mal, ces gens vont tout de même réussir à vivre une semaine ensemble avec des fortunes diverses. Les masques vont tomber et chacun va dévoiler à l'autre sa vraie personnalité. Les maris n'aiment plus leurs femmes, elles ne comprennent plus leurs époux. L'âme soeur est-elle si difficile à trouver? Est-ce pour l'éternité? rien n'est moins sûr. La garden-party où tous vont se retrouver n'effacera pas pour autant les conflits ou les rancoeurs d'une vie de couple trop longue et sans saveur.


Voici le type même d'un film réussi. Michel Blanc tire de cette histoire une analyse très juste, analyse d'une société où la condition n'est pour beaucoup qu'une façade. On est amené à rire de la cascade de situations qui se présentent à nous, ce que l'on fait. Toutefois le réalisateur a tellement bien humanisé ses marionnettes que l'on est également pris de pitié pour ces personnages. La comédie devient alors grinçante et presque dramatique. Il nous arrive parfois d'avoir la gorge serrée tant plusieurs scènes nous font découvrir la détresse de certains qui finissent par craquer, faute d'avoir trop longtemps " fait semblant " . Rien de plus normal d'avoir cette réaction devant l'interprétation aussi juste d'acteurs et d'actrices tels que Jacques Dutronc, Charlotte Rampling, Carole Bouquet, Karin Viard, Clotilde Courau, Denis Podalydès, Michel Blanc et autres...


Michel Blanc nous tend un miroir afin que l'on puisse y refléter une partie de notre propre image. N'hésitons pas à le saisir car le résultat est édifiant. Voici un film qui par son originalité et son réalisme sera difficile à oublier.

Grard-Rocher
8
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le 12 mai 2013

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