Pour son premier film Autumn de Wilde choisit d’adapter un roman de l’illustre écrivaine Jane Austen, une auteure que le septième art aime vu le nombre d’adaptations de ses œuvres portées sur grand écran. Et un art qui le lui rend bien, les films étant en général de bonne qualité. On pense notamment au célèbre « Orgueil et préjugés » de Joe Wright mais surtout à « Raisons et sentiments » de Ang Lee et sa pluie de récompenses. Il y a même des détournements de son œuvre au cinéma avec le teen-movie culte « Clueless » ou en mode Bollywood contemporain avec « Coup de foudre à Bollywood ». « Emma. » est la seconde adaptation du roman éponyme après « Emma l’entremetteuse » avec Gwyneth Paltrow et Toni Collette, encore peu connues à l’époque puisque c’était il y a près de vingt-cinq ans. Et ces deux versions se valent, sympathiques mais pas inoubliables en comparaison à d’autres adaptations. « Emma. » version 2020 étant juste visuellement plus contemporaine et un tantinet plus vacharde que son aînée des années 90.
Il faut avouer dès le départ qu’on a du mal à rentrer dans le film car la mise en route de l’histoire est plutôt laborieuse. En effet, « Emma. » commence vite sans véritable prélude et nous noie sous un déluge de personnages et de noms qu’il nous est bien difficile à assimiler. On s’y perd et cela dure près d’un tiers du long-métrage, ce qui est tout de même préjudiciable puisque notre esprit est un peu confus une bonne partie du film. Il est donc relativement difficile de l’apprécier pleinement dans le sens où les atermoiements amoureux vécus à l’écran semblent opaques. Et par là même de se délecter des joutes verbales et des beaux textes de l’écrivaine puisque notre esprit est davantage préoccupé à saisir qui fait quoi et pourquoi. Il y a également quelques personnages dispensables tels que la sœur de l’héroïne et son mari qui ne font que passer et alourdissent encore la charge de protagonistes à identifier. La fidélité au livre est donc ici un boulet plus qu’une gageure, car il est plus facile de prendre le temps de comprendre et d’assimiler des tenants et aboutissants ainsi que des noms à la lecture qu’en regardant un film où l’on ne peut revenir en arrière.
Mais « Emma » fait partie de ces œuvres qui se bonifient non pas avec le temps mais sur la durée. Une fois passé cette pénible petite heure on prend plaisir à suivre ce délicieux marivaudage victorien où les coups bas sont légers mais les rebondissements nombreux. Les joutes verbales sont fréquentes et plaisantes et les acteurs s’en donnent à cœur joie, dans des postures et situations volontairement ridicules pour nous (donc drôles). Anya Taylor-Joy sort de ses rôles bizarres et/ou torturés et convainc en entremetteuse ingénue. Le reste du casting est du même acabit avec un Bill Nighy en père hypocondriaque et Josh O’Connor, révélé en gay refoulé dans le drame campagnard « Seule la terre », tous deux très drôles en seconds rôles. On apprécie donc sans problème « Emma. » sur le tard surtout que la reconstitution d’une petite ville d’Angleterre du XIXème siècle, des décors aux costumes en passant par les accessoires est en tous points parfaite. Tout comme la mise en scène de la néo-cinéaste qui alterne beaux plans larges et champs-contrechamps habiles avec maestria. Dommage qu’on ne puisse apprécier ce film en costumes dès le départ par manque de clarté narrative.
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