Drôle d'exercice de style qui joue sur deux tableaux à la fois : d'un côté, le drame intimiste d'un homme en difficulté au sein de sa famille (André Dussollier est un père pénible, légèrement invalide, mythomane sur les bords, et une relation qu'on ressent comme compliquée avec son fils et son ex-femme), et de l'autre, une situation de survival très originale à l'échelle du cinéma français, avec une situation d'incendie se faisant de plus en plus menaçante et perturbant grandement l'évacuation. Le concept sied plutôt bien aux épaules de Alex Lutz, toujours aussi convaincant dans des rôles très différents, et le film a la particularité quasiment prémonitoire d'avoir été 1 an avant les incendies dans les Landes de 2022.
Évidemment il ne faut pas trop s'attarder sur la dimension hautement invraisemblable de la situation : on a du mal à imaginer qu'une colonne entière de voitures soit laissée là, abandonnée sur une route en proie au feu de part et d'autre, en pleine évacuation / déviation. En revanche il faut reconnaître à Quentin Reynaud un certain talent dans la retranscription de l'ambiance au cœur de la fournaise, reconstituée en studio bien entendu : progressivement le rouge orangé des flammes gagne de l'ampleur, les cendres envahissent l'espace, la température rend l'air irrespirable. J'ai bien aimé cette ambiance landaise apocalyptique, un peu moins le côté survival qui tend trop à mon goût vers l'abstraction et laisse de côté un certain pragmatisme de la fuite. En plein feu se laisse régulièrement aller à des flashbacks, des rêves non-annoncés, et des rencontres qui font qu'on ne sait pas toujours où on se situe vis-à-vis de la frontière entre imagination et réalité, dans ce chaos et ce brasier. La séquence de huis clos dans la voiture est très bien gérée, oppressante à souhait, avec un travail sur le son et sur la claustrophobie appréciable, mais par la suite toute la litanie des traumas familiaux qui ressurgissent, les non-dits, les angoisses, je trouve ça très moyennement réussi.
Resteront les images de ces flammes aux couleurs presque irréelles, bien davantage que les aspects ayant trait au drame psychologique.