Entre la fin des années 1970 et celle des années 2000, Harold Ramis aura été une figure importante de la comédie américaine, principalement pour ses participations en tant que scénariste ou réalisateur de films cultes aux États-Unis et parfois en France : American College, Meatballs, Caddyshack, les deux SOS Fantômes, Un jour sans fin, etc. Il y a eu bien sûr quelques loupés, des films moins remarquables. Entre ses deux Mafia Blues voici donc un nouveau film, remake d’un film anglais de 1967. Qui n’aura peut-être pas la stature pour faire partie du haut du panier mais qui reste néanmoins suffisamment amusant pour ne pas le bouder.

Endiablé rejoue le jeu classique du pacte faustien entre la pauvre âme et un diable manipulateur. Elliot Richards est gentil, mais un peu trop enthousiasme. A trop vouloir aller vers les autres il ne récolte qu’une écoute hypocrite et dans son dos un certain mépris . Ce brave type est de plus amoureux d’une collègue de bureau mais sa tentative pour lui parler se révèle piteuse. Elliot déclare alors qu’il serait prêt à tout pour changer de vie, ce qui n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd surtout s’il est diabolique.

Une jeune femme à la beauté insolente, à la sensualité explosive et à l’esprit taquin se présente alors, c’est le Diable qui est prêt à accorder à Elliot 7 vœux, mais à la fin il recevra son âme. Notre pathétique héros n’ayant pas grand-chose à perdre se laisse convaincre. Mais les vœux qu’exauce un représentant des Enfers sont forcément réalisés avec de mauvaises intentions. Au fil de ses souhaits et des autres vies qu’il va endosser Elliot va se rendre compte qu’il s’est peut-être égaré dans un jeu de dupes.

Endiablé est un cadeau à Brendan Fraser, qui s’en donne à coeur joie dans les différents vœux qui sont autant de fantasmes pour Elliot. Ce dernier va ainsi avoir l’opportunité de devenir -littéralement- quelqu’un d’autre à chaque fois. Si jamais il était possible de douter des performances comiques de l’acteur, le film d’Harold Ramis lui offre un écrin pour changer de têtes et d’expressions, parfois avec un minimum de maquillage. Il est ainsi hilarant en homme « important » colombien avec sa moustache et sa gestuelle toute latino. Par la suite il demande à être si sensible qu’un coucher de soleil le fait pleurer, dans une incarnation à fleur de peau prête à exploser en sanglots. En tant que basketballeur, il est ainsi une force de la nature en muscles et en sueur, mais à l’esprit un peu bas malgré sa haute taille. Et ainsi de suite pour ses autres incarnations. De tels films où les acteurs enfilent plusieurs rôles peuvent être réussis, selon qui s’y colle, ce n’est pas la même chose entre Eddie Murphy ou Dana Carvey (Le Maître Du Déguisement, brrr). Brendan Fraser démontre ainsi des performances comiques dans l’outrance et l’exagération assez remarquables, dans des rôles pourtant très différents les uns des autres au fil du film.

L'acteur offre un très bon duo comique avec Elizabeth Hurley, en diable féminin et ironiquement coquin. Malgré un jeu plus limité, elle offre un contrepoint amusant, jouant d’une féminité qui s’amuse des fantasmes au fil de ses apparitions, tandis qu’elle garde bien évidemment le contrôle et s’amuse. Ce diable reste assez amical avec Elliot, comme deux bons amis, bien qu’il soit difficile de lui faire entièrement confiance.

Tout Endiablé tend vers l’acceptation de soi, et des ressources que l’on possède en soi, plutôt que des vœux et des fantasmes que l’on souhaiterait concrétiser. La morale reste tout de même floue, et peu importante. Mais si on s’amuse dans le film de la découverte des nouvelles péripéties, agrémenté de quelques effets hollywoodiens pour impressionner avec en vrac quelques cascades, des scènes de foule, des vieux costumes et un carambolage de voitures, la répétition de la structure est bien vite évidente. Chaque nouvelle vie d’Elliot est une surprise, dont l’humour est tout de suite perceptible et qui s’accomplira dans un rebondissement final. Mais tout cela ne fait que répéter la même structure, avec un retour au réel où Elliot se plaint auprès du Diable de ne pas avoir compris son vœu, quelle surprise.

Harold Ramis a repris le script de Larry Gelbart, en collaboration avec Peter Tolan avec qui il avait déjà travaillé sur Mafia Blues. Le résultat n’est pas déshonorant, même si d’un point de vue plus reculé il donne l’impression que le film avance sur ses rails, sans bien savoir où il va, Eliott persistant dans l’erreur. Sur le DVD du film il y a une grande quantité de scènes coupées et même dans une des bandes-annonces on peut en voir deux qui n’ont pas été retenues, ce qui démontre un montage encore indécis quelques mois avant la sortie finale. Une autre scène remplacée du montage présente ainsi Elliot comme une rock star se droguant, jurant, prêt à faire l’amour avec sa compagne. Une idée bien plus sauvage et audacieuse qu’un film au ton tout de même bien sage, malgré la petite sensualité du Diable. Une scène coupée présente ainsi Elizabeth Hurley en soubrette. Est-ce que le film a souffert de réecritures, de changements de ton ? Difficile à dire. Mais des possibilités, qui ont bien été filmées ont été mises de côtés.

Endiablé est ainsi en l’état une petite farce qui rejoue le jeu du pacte faustien mais avec une jubilation excessive et un contenu un peu creux. Le film d’Harold Ramis hésite entre sa petite loufoquerie et son parcours sur rails. Ce qui ne le rend pas mauvais, il reste sympathique pour ses idées de mise en scène au profit de ses vies fantasmées et ses acteurs aux multiples visages, tel ce Brendan Fraser d’un comique toujours renouvelé.

SimplySmackkk
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le 10 nov. 2023

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