Elio Petri montre à travers le procédé de l’absurde le cynisme des institutions et de leurs dirigeants, dont le personnage du Dottore est la personnification. Celui-ci, corrompu par l’exercice du pouvoir, grisé par sa toute-puissance, commet un crime pour défier la Justice dont il est le garant. S’amusant à embrouiller les pistes de l’enquête, démontrant tout à tour sa culpabilité et son innocence, il veut surtout prouver son impunité totale que lui octroie son poste et sa position. Elio Petri, cinéaste engagé, cherche ainsi à révéler l’injustice du système politique d’alors, qui protègent les décideurs cependant qu’il fait la chasse à des manifestants et aux liseurs du livre rouge tout en comptabilisant non sans grotesque les graffitis d’extrême gauche - rappelant « la stratégie de la tension » grâce à laquelle certaines officines italiennes et étrangères espèrent favoriser l'installation d'un pouvoir autoritaire, faisant ainsi barrage au communisme.

À l’aube des années de plomb, le personnage du Dottore constitue la caricature d’une nouvelle forme étatique où le contrôle des masses, l’autoritarisme et la tentation dictatoriale s’insinue dans une pantomime de démocratie aux relents fascisants, et dont l’acmé est ce superbe et halluciné discours où il apparaît que « la répression est la civilisation ». À l’opposé se trouve l’étudiant de gauche que le Dottore veut inculper, sorte de bouc-émissaire, après que son amante s’est donnée à lui après l’avoir abandonné – jalousie l’ayant en partie conduit au crime. Cette femme assassinée incarne ainsi l’image de l’Italie, passant aux mains d’un extrême à l’autre, mais que la droite extrême sacrifie pour ne pas la perdre. Tel est donc le cynisme et la cruauté de ces élites, représentées par le personnage complexe, machiavélique et violent du Dottore, incarné par un Gian Maria Volontè survolté, habité par la folie destructrice de son personnage, souvent filmé dans des gros plans oppressant le rendant encore plus menaçant.

Toutefois, son rôle l’enferme dans une prestation plutôt uniforme, alors que le climat asphyxiant épuise le spectateur et qu’il est compliqué de suivre un tel personnage tourner un peu en rond durant plus de 1h40.


Marlon_B
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le 3 nov. 2024

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