La séparation de l'Église et de Lestat
Pour une fois, strictement rien à redire par rapport à l'adaptation et pour cause, c'est Anne Rice elle-même qui a écrit le script.
Cela donne à la fois au film une grande cohérence et un bon rythme.
Très appréciable.
On retrouve tout ce que j'aime dans le monde vampirique : le romantisme (au sens galant du terme), la quête d'identité, la culpabilité, la sensualité.
De plus, et c'est ce que j'avais aimé dans les livres d'Anne Rice, le respect d'une certaine vision de cette mythologie vampirique.
Fi de l'ail, des crucifix, l'eau bénite et toutes ces conneries.
Cet univers est en outre très proche d'un autre que j'ai régulièrement cotoyé dans le jeu de rôles Vampire La Mascarade.
Il est amusant de chercher à faire les rapprochements entre les clans de ce jeu, et les vampires que l'on voit dans le film.
Le personnage de Louis, au centre de l'histoire, est fascinant.
Torturé par sa nature, il lutte férocement, et inutilement, contre les impératifs de sa condition.
Il cherche des réponses, trouve des pis-aller pour atténuer sa souffrance.
Lestat et son insouciance, répandant la désolation autour de lui jusqu'à s'aliéner ses propres frères, soeurs, fils et filles...
Et Claudia, toute de paradoxes et de frustrations, cruauté de l'enfance puis réalisation de sa condition de femme emprisonnée dans un corps d'enfant, l'accomplissement de certaines envies et fantasmes devenu inatteignable.
Le côté charnel du baiser vampirique est bien rendu, ainsi que la capacité pour le damné de rendre l'étreinte plaisir ou douleur.
On voit d'ailleurs, mieux que souvent, combien ces sentiments dépassent la frontière du sexe, et l'homosexualité est évoquée, fût-ce un peu timidement.
La responsabilité qui incombe à celui souhaitant infanter, garant devant ses pairs de la conduite de ses infants le cas échéant.
Tout cela est admirablement, subtilement mis en scène.
Le casting sert d'ailleurs impeccablement le propos, avec des acteurs pour la plupart encore en devenir, et donc se donnant sans arrière-pensée réelle je crois.
Derrière ces éloges, il y a malgré tout la réalité de l'adaptation cinématographique.
Un côté grandiloquent bienvenu par moments mais cédant parfois, un peu trop souvent, à l'excès.
Ceci se traduit notamment au niveau de la musique, entêtante et souvent bien trop portée sur le mystique, certes nécessaire mais mal dosé ici.
Les costumes, agréables à l'œil, sacrifient beaucoup à l'imagerie populaire du vampire, les capes, les hauts-de-forme, les manches à froufrous...
Le message délivré est fort de sens et de nuances.
Entre quête de la rédemption, culpabilité, peur de la solitude et résignation, la complexité d'une vie immortelle, d'une vie de chasseur a rarement été si palpable.
Fidèle au livre, parfois un peu trop si on veut chipoter, Entretien avec un vampire demeure à mon sens une référence du genre, à voir d'urgence pour tout amateur du genre, et à découvrir avec une curiosité gourmande pour les autres.
Et bon appétit bien sûr.