- Après le succès de Pour une poignée de dollars, Sergio Leone s'attelle à la réalisation de Et pour quelques dollars de plus. Si Clint Eastwood rempile dans le rôle du cow-boy sans nom, Leone doit trouver un vieil acteur pour incarner Mortimer, nouveau personnage-clé de l'intrigue. L'entreprise va s'avérer plus compliquée que prévu...
Voyage à Hollywood
En tant que passionné de westerns hollywoodiens, Leone voudrait engager un acteur américain ayant déjà joué dans ces productions. N'ayant pas d'idées précises en tête, il décide de prendre un billet pour Hollywood , espérant trouver plus facilement ce qu'il cherche à la source. Durant le vol, une illumination lui apparaît. Il se souvient de ce tueur au regard glaçant présent dans le film Le Train sifflera trois fois. Celui-ci serait parfait pour jouer Mortimer. Le problème est qu'il ne connaît pas le nom de cet acteur et qu'à cette époque, Wikipedia ou IMDB ne sont pas là pour répondre à sa question en quelques secondes.
Leone n'a d'autres choix, une fois arrivé à Los Angeles, que de se faire projeter le film en question pour obtenir le nom de ce comédien mystérieux. Il découvre qu'il s'agit ni plus ni moins que de Lee Van Cleef, acteur dont l'air machiavélique lui a valu de jouer dans d'innombrables westerns en tant qu'homme de main du méchant principal. Toujours cantonné dans ce genre de rôles secondaires , il n'a jamais réussi à réellement percé dans le milieu.
Leone est heureux d'avoir trouvé sa perle rare et part à sa recherche...
Leone l'inspecteur
Il décide de visiter les agences d'acteurs pour retrouver la trace de Van Cleef. Le réalisateur de westerns se mue en un véritable détective de films noirs et se révèle particulièrement bon, vu qu'il finit par trouver l'agence qui emploie l'acteur. Hélas, lorsqu'il demande où il peut joindre Van Cleef, on lui répond : « Cela risque d'être compliqué. Van Cleef a pris sa retraite et travaille maintenant dans une agence de publicité. »
Sans doute que l'acteur, fatigué de sa carrière en dent de scie, avait décidé de tout plaquer. Leone ne se démonte pas et remonte la piste. À l'agence de publicité, le secrétaire lui révèle : « On l'a viré. Il est tombé en dépression après un accident de voiture...
- Et où pourrais-je le joindre ? s'enquit Leone.
- Voici son adresse. Apparemment, il passe maintenant son temps à peindre et à boire. Surtout à boire... »
Leone sait enfin où trouver Van Cleef et n'a que faire celui-ci soit à la retraite. Il l'engagera coûte que coûte. En arrivant chez lui, il est immédiatement impressionné par l'intensité du regard de l'ex-acteur et sa ressemblance avec Van Gogh. Leone lui propose donc immédiatement le rôle. Van Cleef secoue la tête : « Désolé, c'est impossible. Je ne suis pas libre...
- Mais pourquoi ?!
- Je dois finir un tableau pour un client qui est prêt à me payer 250 dollars.
- Mais moi, je suis prêt à vous en donner 15.000 pour jouer dans mon film ! »
Van Cleef reste là, incrédule, pensant que le réalisateur italien lui fait une farce. Il faut toute la persévérance de Leone pour le convaincre de prendre l'avion pour Rome et tourner le film.
Van Cleef ne le sait pas encore, mais il s'apprête à devenir la légende du western qu'il a toujours voulu être. Quant à Leone, il peut enfin ranger son imper de détective au placard et ressortir sa caméra.