Été violent par Alligator
juillet 2009
Mon premier Zurlini ne sera certainement pas le dernier. Si ce n'est une fin un peu poussive, à l'accentuation mélodramatique un peu lassante, le film m'a fortement emballé. La manière de construire cette relation amoureuse par petites touches, de plus en plus sensuelles est extraordinairement maîtrisée. Du point de vue de l'écriture, on a là un petit bijou messieurs dames (au scénario : Suso Cecchi d'Amico, Giorgio Prosperi et Valerio Zurlini). Ajoutez à cela une photographie somptueuse de Tino Santoni, surtout quand la nuit fait son apparition, alors un grand spectacle romantique vous saute délicieusement au visage. La soirée chez Trintignant est superbement éclairée, un savant mélange entre danse et peinture. La science du cadrage, les jeux d'ombres et lumières orchestrent une sorte de ballet de plans sur une musique douce, d'une chaleur pénétrante (voir la video "temptation"). Le film parait alors verser dans le genre romantique, film de vacances, film d'été.
Parfois comme lors de la première soirée avec les actualités lugubres de la radio, ou le raid aérien sur la plage, les réalités sordides de la guerre essaient de déchirer ce qui aurait pu ressembler jusque là à une bluette ou même une simple histoire de cul. Mais le talent des scénaristes s'imposent : le temps que prennent le scénario et la mise en scène permet de développer cette idylle bien au delà, en une grande histoire d'amour que les personnages investissent comme un hâvre de paix, une échappatoire, une bouée de sauvetage.
Lui, un brin dilettante, est un jeune fils à papa. Papa fasciste. Loin d'être un intellectuel, il fait un petit complexe vis à vis de ses amis et cette femme plus mûre lui fait oublier le vide de son existence sous l'aile protectrice paternelle. Elle, veuve d'un héros de guerre, vient de passer la trentaine et tout le monde, sa mère au premier chef, lui ont attribué un seul rôle auquel elle ne doit déroger, celui de mère et veuve. On ne lui accorde aucun droit à une autre existence, notamment amoureuse. Sa famille anti-fasciste et plus intellectuelle, n'en demeure pas moins réfractaire à ce qu'elle envisage une nouvelle vie. Scandale.
Aussi ces deux êtres tombent-il amoureux sous de bien vilains auspices : la guerre, l'honneur familial bafoué, les soubresauts politiques d'une Italie qui perd la guerre et la face. La fin d'une époque. Il est trop difficile de définir les contours de la nouvelle. L'avenir est encore plus incertain à la fin du film. Après le fracas des bombardements, l'avenir reste sombre et violent. Pourquoi clore le film sur une note aussi aigue? La fin du film s'étend un peu en longueur. Le dernier quart d'heure place les personnages dans des outrances qui jusque là les avaient épargnés. Dommage, le film eut été sublissime.
Restent des séquences magnigiques. Et pour ma part, je découvre une actrice Eleonora Rossi Drago, belle et au jeu très fin. Trintignant impressionne avec un rôle tout en retenue. Chez les deux comédiens, la furie de la passion est contenue ; elle n'affleure que dans les regards, dans les mains qui embrassent ou dans la manière qu'ont ces deux corps de se toucher, se coller, se caresser. Trés émouvants. Applaudissements.