• Le film est sorti en 2004. Il a été réalisé par Michel Gondry et écrit par Charlie Kaufman.
  • Né en 1963 à Versailles, Michel Gondry fut d’abord connu pour sa réalisation de clips musicaux icôniques, loufoques et fantaisistes tels que :
  • - Bjork « Army of me»
  • - Daft Punk « Around the world »
  • - Du groupe The chemical brothers
  • - Ou « Je danse le mia ». Ça calme non ?
  • Sa transition vers le cinéma s’est faite naturellement avec la réalisation de son premier court-métrage « La lettre » en 1998. Elle donnera lieu 3 ans plus tard à une première collaboration avec Charlie Kaufman « Human nature » racontant l’histoire d’un couple ayant perdu foi envers l’humanité et décidera de partir s’exiler dans la jungle en raison de leurs convictions intimes liées à l’écologie.
  • Pour ceux ne connaissant pas Charlie Kaufman, c’est le papa du long-métrage « Dans la peau de John Malkovitch ». L’idée farfelue et brillante vient d’un ami commun pendant un dîner, Pierre Bismuth. Il demanda à Michel Gondry : « Comment réagirais-tu si tu recevais une carte t’annonçant que tu as été effacé de la mémoire d’une personne proche, et que tu devrais désormais t’abstenir de tout contact avec elle ? ». Cette idée a germé dans l’esprit du duo Gondry-Kaufman et ils décidèrent plusieurs années plus tard de se lancer dans ce projet fou.
  • Jim Carrey n’était pas pressenti pour le rôle de Joël selon les souhaits initiaux de Michel Gondry et de Charlie Kaufman. Il devait revenir initialement à Nicolas Cage (ayant collaboré avec Charlie Kaufman sur le film Adaptation). Nous avons le plaisir de revoir Tom Walkilson (The full monty) incarner le Dr Howard Mierzwiak, Kirsten Dunst jeune actrice ayant décroché le rôle de secrétaire discrète Mary ainsi que Mark Ruffalo se démarquant dans son personnage de Stan avant d’incarner Hulk (si tu as le malheur de lui chatouiller le petit orteil, gare à toi car il se transformera en gros monstre vert musclé et pas commode ! alors stp ne le dérange surtout pas même légèrement cher lecteur ?).
  • Michel Gondry a laissé une liberté totale à ses acteurs et actrices. Ils pouvaient improviser autant qu’ils le voulaient. D’ailleurs, le scénario de base a été peu retranscrit à l’écran (il y a eu un grand écart olympique entre ce qui a été réalisé et monté par rapport à la version de base). Finalement, « Eternal sunshine of the spotless mind » est une réussite totale. La temporalité n’était, déjà, pas simple à gérer de base et afin de la retranscrire le plus simplement possible à l’écran, il a fallu rivaliser d’inventivité pour le rendre accessible au public.
  • Le film s’est transformé peu à peu en un documentaire fictionnel grâce à la flexibilité du texte et un choix esthétique fortement ancré se rapprochant d’un travail exigeant de plasticien. La scène du défilé d’éléphant a été tourné sur le vif. Lorsque Clémentine sort de l’image, Jim Carey la cherche réellement. Nous pouvons même lire sur ses lèvres qu’il prononce le prénom Kate et non celui de Clémentine. Les effets visuels sont des effets de trucage et/ou de mise en scène comme une mise au point, le jeu de lumière, les acteurs devaient faire le tour du plateau avec des décors truqués et des trappes pour se retrouver de l’autre côté du cadre : cette situation donne une réelle confusion entre les effets spéciaux et réels c’est bluffant !!!
  • Cette caméra épaule accentue l’instabilité des personnages et donne un côté réaliste au film. Le monde de Joël s’effondre et il ne pourra rien y faire pour empêcher un tel désastre. Le recours à la lumière permet de réaliser des transitions entre les différentes scènes du film. Elle montre aussi la difficulté de Joël à se remémorer des éléments de sa vie commune avec Clémentine. Plus il remonte dans ses souvenirs lointains la concernant, moins ils sont clairs et perceptibles. Il ne se souvient que de l’essentiel. Certains flashs ne mettent uniquement qu’en lumière les deux personnages alors que le reste du décor est totalement sombre.
  • Charlie Kaufman aime y distiller des références de ses anciens films. Nous le remarquons avec les vers du poème Eloïsa to Abelard d’Edgar Poe cités par Kirsten Dunst, auteur déjà présent dans La peau de John Malkovitch avec le poème Le corbeau.
  • C’est un peu à s’arracher les cheveux mais le cheminement temporel du long-métrage est réglé au millimètre grâce à la couleur des cheveux de Clémentine : la demoiselle change de couleurs de cheveux comme de chemises. Ce changement se fera en 4 temps comme les 4 saisons. Lors de sa rencontre avec Joël, Clémentine a les cheveux verts. Leur première rencontre avec Joël aura lieu sur la plage glaciale de Montok (Long island). Vient par la suite la phase de bonheur du couple : ils sont très heureux tous les 2. Les cheveux de Clémentine sont de couleur rouge vif, couleur symbolisant la passion et l’amour. Survient par la suite la rupture du couple battant de l’aile : ils décident, par conséquent, de se quitter. Ses cheveux sont orangés. Ils sont lassés et usés de cette relation nocive. Ce nouveau départ arrive lorsqu’ils se rencontrent de nouveau dans le train : Clémentine a les cheveux bleus.
  • La progression de leur relation fait référence au subconscient de Joël passant d’un moment d’insouciance à un moment de doute où Clémentine aura cette vive réaction de panique et de stress intense. Ce long-métrage dépeint les différentes étapes de l’amour. Il passe par tous les stades : celui de l’amour fou, l’amour passion se transformant progressivement en fleur fanée marquant la fin de la relation de ce couple. Le personnage masculin passera son temps à se ressasser sans cesse leurs souvenirs communs afin de ne pas la laisser partir de sa vie ou de sa mémoire. Cette fresque réelle sur la problématique amoureuse est dure et poétique à la fois. Elle aborde le sujet de la naissance et la mort d’une relation amoureuse de A à Z : tout ce qui se passe dans la tête des gens durant ce lapse de temps.
  • Cette dynamique amoureuse passera tout le long du film par l’apparition de couleur. Celle-ci les oppose totalement. Joël est vêtu tout du long avec des vêtements de couleur terne rappelant son caractère introverti depuis son enfance et est défini comme un être peu expressif. Les couleurs faisant irruption dans sa vie viennent quand il rencontre l’amour (scène de la gare, les cadeaux ou fleurs offerts au moment de la Saint-Valentin offerts à Clémentine). La même chose se produit sur Clémentine : les images se délavent sur elle malgré ses vêtements colorés (tenue flashy arborée). Ses cheveux deviennent ternes et se transforment : ils sont à la limite de l’inertie et deviennent orange. La couleur représente bien la psychologie de ce personnage excentrique. Clémentine est une personne extravertie. Clémentine exprime ses émotions via la couleur de ses cheveux. Ses différentes teintures représentent les différents stades de sa relation de couple avec Joël. Au début, ils sont verts puis virent au rouge pour symboliser le grand amour. Petit à petit, des conflits surviennent et ses cheveux deviennent orange pour finir bleu symbolisant la froideur de leur nouvelle relation.
  • Elle ne veut pas être avec un homme gentil et pense qu’elle a besoin d’une personne aussi excentrique qu’elle sinon sa relation amoureuse ne fonctionnera pas et ne durera, par conséquent, pas longtemps. Leur relation est perdue d’avance quand ils décident de se mettre en couple car ils recherchent chez l’autre quelque chose qu’ils n’ont pas. Ce qu’ils apprécient dans leur couple, c’est l’idée de ce que représente l’autre et du vide que la personne aimée peut combler. La mort est présente tout au long du film avec la présence de la pendule ou divers objets de la maison présageant cette fin tragique. Si nous regardons attentivement dans les craquelures de la glace, nous distinguons la mort. Le couple vogue vers son propre anéantissement avec Clémentine comme capitaine du navire ayant décidé de mettre fin à son histoire et à rayer Joël de ses souvenirs.
  • Mention spéciale à Jim Carey touchant de bout en bout dans ce film ayant réussi son virage dans le genre dramatique. En ayant enchaîné The Truman show et Man on the moon par la suite, ils furent ses cartes de visite pour intégrer le casting. Kate Winslet est émouvante et énergique. Cette fusion des deux acteurs est parfaite. Ce duo fonctionne à merveille !!! L’ensemble du casting est logique et cohérent. Nous avons cette impression que chaque rôle a été écrit sur mesure pour tous les protagonistes du film (le casting rêvé 4 ou 5 étoiles à vous de juger !!!). Cette esthétique naturaliste marquée doit être saluée et soulignée amorçant un tournant lynchien avec une séquence macabre, inspirée certainement de « Mullholand drive ». Cette histoire relate un récit qui se répète : ils n’apprennent pas de leurs erreurs puisqu’ils préfèrent utiliser la facilité en effaçant les souvenirs de leurs mémoires plutôt que d’affronter leurs peurs. Ironiquement, c’est en effaçant ses moments de vie de couple que Joël entre en introspection avec lui-même. Mais au réveil, il a tout oublié et redevient le même homme névrosé. La seule personne qui décide de changer est Marie en apprenant que sa mémoire a déjà été effacée. Elle démissionne à la fin du film et décide de restituer les dossiers à chaque client en espérant qu’ils puissent apprendre de leurs erreurs. Mais Joël et Clémentine se lancent un nouveau défi dans cette boucle sanglante. Comme le montre la fin notamment lors des dernières minutes du film, la mort de leur nouvelle relation est à présager. D’ailleurs les cheveux de Clémentine tournent au vert annonçant le début d’un nouveau cycle : ils acceptent la fatalité de leur couple et sont condamnés à répéter les mêmes erreurs encore et encore.
  • Le travail n’est pas seulement visuel mais sonore. Elle souligne l’alchimie du couple : elle démarre quand ils parlent et s’arrête quand ils se taisent. Alors que tout va en reculant, la musique se met à s’inverser. Si on joue la scène à l’envers, le son permet de montrer les failles du projet Lacuna. Bien que Clémentine soit effacée de sa mémoire, il reste cependant des fragments d’elle dans la tête de Joël. Ces failles font qu’ils se retrouvent alors qu’ils auraient dû s’oublier. La bande origine musicale porte le film à bout de bras sur ses épaules et passe par une palette subtile de joie, de peur ou de tristesse se calquant parfaitement au jeu des acteurs. La chanson « Everybody’s gotta learn sometime » de Beck est un crève-cœur arrivant en fin de film.
Lili-Jae
10
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le 29 oct. 2023

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Lili-Jae

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