« The Comfort of Strangers » n’est pas le plus accessible des films de Paul Schrader, surtout si l’on n’est pas familier du réalisateur. D’aucuns ne pourrait y voir qu’un vulgaire soap-opera érotique, sans rythme et sans intrigue. Pourtant, ce film est d’une rare beauté et exprime beaucoup de choses…
Le scénario est d’Harold Pinter, sur une musique sublime d’Angelo Badalamenti, « The Comfort of Strangers » raconte l’histoire d’un jeune couple anglais en vacances à Venise afin de tenter de sauver leur couple. Ils font la rencontre d’un homme mystérieux et de son épouse avec lesquels se tisseront une relation étrange…
Déjà, le film est magnifiquement filmé avec des cadres somptueux, Venise est mis en valeur de la plus belle des manières. Le château du couple vénitien paraît presque irréel, antique… Les acteurs sont tous bien (à regarder en version originale, la version française est infecte.). Formellement, le film se suffit à lui-même.
Parlons du fond.
Je comprends aisément ce qui a pu intéresser Schrader dans ce scénario, ses deux thèmes de prédilection sont présents : la conception de l’amour moderne et la tradition. Lui qui prend plaisir à montrer la contradiction des choses, des actes d’un personnage ou même d’une valeur, c’est ici l’apothéose de ce principe. Le couple en crise représente le couple moderne cherchant à revitaliser leur amour, ils rencontrent un homme qui a été élevé à la dure, ou les punitions étaient faites de violence corporelle sévère, cet homme et sa femme sont bien plus traditionnel dans leurs rapports affectifs, bien plus éloigné du sentiment. Un couple si différent d’eux, un couple qui les attire et les répugnent en même temps. Inconsciemment, le couple moderne cherche ce qui fonctionne chez le couple traditionnel, il est intéressant qu’après la première visite chez eux, le jeune couple semble plus heureux, ce n’est pas anodin dans le scénario…
Finalement, si d’un côté, les jeunes amoureux cherchaient des réponses dans le passé, le couple traditionnel se jouait d’eux afin d’expérimenter l’amour Sadien, la souffrance comme moteur de la jouissance, jusqu’à la tragique conclusion.
« The Comfort of Strangers » est finalement les effluves croisés d’une éducation conservatrice violente produisant des déviances que l’on retrouve actuellement dans la société moderne (pornographie) et des amoureux modernes cherchant simplement un moyen de retrouver leurs sentiments.
L’émotion, la modernité, la tradition et la chair.