On peut critiquer le scénario trop complexe d'Almodovar, le foisonnement de personnages qui, au final, ne servent qu'à distraire l'attention du cœur sombre du film, sans parler de l'indiscutable lenteur avec laquelle l'intrigue - secrète - des "Etreintes Brisées" se noue… Oui, et admettre que le dernier Almodovar ne sera pas son meilleur… N'empêche que le film est régulièrement transcendé de véritables coups de génie, autant formels que conceptuels (je pense par exemple à l'éblouissante scène "doublée" de la déclaration de rupture), et que sa deuxième heure, mélodrame noir et torturé, touche au sublime : on se dit alors que, décidément, il y a peu de réalisateurs vivants qui peuvent ainsi se poser sans forfanterie aucune en digne successeur de Hitchcock (la scène de l'escalier, terrible !) et de Sirk… tout en citant Rossellini ! Et, à la fin, quand tout est joué, Almodovar a la générosité de nous offrir dix minutes parfaites de "movida", clin d'œil chaleureux, irrésistible, à un passé partagé. Nous nous sommes tant aimés… [Critique écrite en 2009]