Petit avertissement : la critique concerne plus la tétralogie Rebuild dans son ensemble que le quatrième film en particulier. Aussi, quelques spoilers (légers) sur les films, la série, etc.
C’est tout de même curieux qu’une série d’animation japonaise aussi influente que Neon Genesis Evangelion soit encore considérée, par beaucoup de ses fans, comme une œuvre frustrante, « mal finie », « incomplète », malgré ses innombrables excroissances, films, mangas, patchs plus ou moins correctifs et contradictoires appliqués sur la plaie béante que constituent ses deux derniers épisodes.
Ceux qui espéraient que la tétralogie filmique Rebuild apporterait un peu d’ordre et de clarté au chaos narratif et thématique de la série vont sans aucun doute finir par se retrouver le bec dans l’eau. Commencée en 2007, achevée 15 ans (!!!) plus tard, cette refonte en quatre parties envisage le concept du remake sous un angle à chaque fois différent.
• Le premier est une resucée mécanique, quasiment plan par plan, des premiers épisodes, faisant quasiment l'impasse sur tout l'aspect relationnel et intimiste entre les protagonistes.
• Le deuxième, plus abouti visuellement, corrige légèrement le tir, en ramenant un supplément d'âme et de contemplation, puis se termine sur un twist qui jette à la poubelle le dernier tiers de la série, et remet tout à plat.
• Le troisième, de loin l’opus le plus audacieux — et le plus mal-aimé —, s’ouvre sur une ellipse et un bond de plusieurs années en avant, obscurcis encore plus l’intrigue originale (si, si, c’est possible), et se pose presque comme un prolongement, une pseudo-suite, à la série…
Ce qui laisse au quatrième film la lourde tâche de digérer cette somme de revirements et de clore ce nouveau maelström narratif. Contre toute attente (?), le dernier chapitre de Rebuild choisit finalement d’embrasser les imperfections plus ou moins volontaires de la fin de la série, et décide de tout envoyer valdinguer, après une magnifique parenthèse pastorale qui évoque les heures les plus lumineuses des studios Ghibli, et une orgie d’affrontements robotiques tellement dénués d’enjeux compréhensibles qu’ils finissent par devenir complètement abstraits.
Retour assumé à l’ego-trip expérimental et psychanalytique, conclusion « it gets better » bouleversante, ceux qui n’ont jamais vu la série — ou qui n’ont pas voulu la comprendre — seront impitoyablement laissés au bord de la route. Pour les autres, ceux qui ont un rapport véritablement affectif au chef-d'œuvre de Hideaki Anno, ados ou jeunes adultes mal dans leur peau ou dans leur tête, qui ont découvert la série à l’époque, ça va forcément un peu piquer les yeux.