Par où prendre ce glorieux bordel qu'est Everything, Everywhere, All at Once? Comment expliquer à quel point ce film est bon, à quel point il m'a touché, et à quel point il me fait chaud au coeur sur tous les niveaux possibles des multiples réalités que rencontrent la projection d'un film au cinéma?
Ça va pas être facile!
D'un autre coté personne ne m'en voudra de partir dans tous les sens pour un film qui n'hésite pas à en faire de même, alors...
1. Tout et n'importe quoi
Everything, Everywhere All at Once c'est:
-Un film de Science fiction
-Une fable sur la différence, son rejet et son acceptation
-Une comédie déjantée d'une grande intelligence
-Une comédie régressive bas de plafond
-Une comédie romantique
-Un film d'arts-martiaux
-Une utopie
-Une dystopie
-Un film qui passe à tabac à gros coups de mandales philosophiques le pessimisme et le nihilisme ambiant
-Un blockbuster
-Un film d'auteur
-Un carnaval chaotique d'idées visuelles réjouissantes
-Un film original et audacieux
-PAS UN PUTAIN DE REMAKE, REBOOT OU QUE SAIS-JE ENCORE! (miracle une histoire originale!)
-Un film de de super-héros avec des vrais humains dedans
-Pas un film de super-héros
-Un film aux enjeux universels
-Un film aux enjeux minimalistes
-Un film familial
-Un film a réserver à un public averti
-Un film qui prend au sérieux le fait de ne pas se prendre au sérieux
-Un film qui prend son histoire au sérieux sans avoir besoin de l'amoindrir avec une blagounette toutes les deux minutes.
-Un film rempli de blagues toutes les deux minutes
-Un film absurde, surréaliste limite dada par moments
-Un film ancré dans le réel
-Un film aux valeurs traditionalistes
-Un film aux valeurs progressistes
-Un film qui va diviser
-Un film qui va rassembler
-Un film qui réjouira les naïfs et fera chier les cyniques
-Un film humaniste qui fera pleurer les cyniques
-Un film, un vrai, un qui fait schboum là dedans
-Une ode à la saucisse
-Un film d'une cohérence à toute épreuve
-Du grand n'importe quoi!
Et rien de tout ça n'est contradictoire.
2. Partout
Nous rentrons dans la salle, elle et moi. Nous sommes seuls dans cet immense salle de multiplex. Drôle de sensation.
Nous allons nous asseoir où nous avons envie. C'est précisément l'endroit qui nous avait été alloué. C'est rigolo.
Est-ce que tout est déterminé ou que le hasard fait bien les choses?
La salle est pleine de nous qui se sont assis à tous les endroits peut-être? Mais toujours ensemble... Toujours et partout...
Nous regardons le film. Nous rions. Nous sommes étonnés, émerveillés, bouleversés. Que ça fait du bien de voir un bon film.
Je verse une larme sur un discours sur la gentillesse et l'attachement par Waymond. Elle est contre moi alors ça va mieux. Et si le grand bagel noir finit par tout emporter, comme il a déjà emporté tant de choses et tant de personnes dans ma vie, ça ne veut pas dire que tous ces moments n'avaient pas de sens. Et ce moment où elle et moi regardons la même fenêtre qui donne sur tant de réalités qu'on appelle le cinéma, ce moment là, existera à jamais, entre deux éternités.
Le film se termine (mais le film se termine-t-il jamais vraiment?). Nous sortons de la salle peut-être au même moment où dans un autre univers on y rentre; et on s'aime. Et c'est tout ce qui compte.
3. En même temps
Everything Everywhere All at Once est un film fou, bordélique, visuellement aussi foutraque que brillant, bien rythmé, bien monté, bien filmé, mais surtout un film beau, profondément bienveillant, touchant, optimiste et humain. Un antidote au pessimisme et au nihilisme. Et oui, je parle d'un film avec des séquences dans lesquels les gens ont des saucisses au bout des doigts ou bien se battent avec des trucs dans le cul, et qui est malgré tout parvenu à me faire verser des larmes, tour de force supplémentaire. Un film original, audacieux et à part. Une réussite éclatante qui aborde nos choix, nos regrets, la valeur de chaque expérience y compris les plus humbles et notre condition humaine sous un angle inattendu. Et un veritable chef d'oeuvre!
Dans un monde qui ne cesse de se fracturer à tous les niveaux, on peut regarder Everything, Everywhere, All at Once pour se rappeler notre besoin d'amour, de gentillesse, de connexion, de liens, et ce que c'est d'être un humain aussi paumé soit-il dans un monde qui parait souvent ne plus avoir le moindre sens.
Et si vous n'êtes pas d'accord, ça ne fait rien, je vous aime quand même (même si ce n'est pas facile).