Assurément, ce n’est pas un film comme Evil Dead qui pourra me réconcilier avec le cinéma de genre. Bête à bouffer du groin, réduit au strict nécessaire en termes d’intrigue, dénué de tout propos, l’œuvre assume gentiment son caractère gore et fun sans jamais se prendre au sérieux.
Historiquement, pourtant, Evil Dead garde sa place : celle d’un premier film fauché, par un réalisateur de 20 ans, Sam Raimi, avec qui il faudra désormais compter. Quand on y pense, d’ailleurs, par la seule évolution de la trilogie Spider Man, à savoir d’un joli blockbuster à une machine dépourvue de toute âme, et jusqu’au tout numérique prequel Oz, le chemin parcouru est aussi important que triste ; et semble accréditer la thèse que le manque de moyens, loin de brider un auteur, peut exacerber sa créativité.
Evil Dead, outre sa stupidité notoire, et qui sera assumée de plus en plus dans les volets suivants, est ainsi un vivier à idées. Si elles ne sont pas toutes réussies, et si le résultat a souvent terriblement vieilli, ces expérimentations confèrent à ce film une valeur incontestable sur les effets spéciaux d’antan, à l’heure du latex, du sang organique et du stop motion. Tout y passe, dans un délire baroque au gore festif, certes lassant dans sa répétition, mais attestant d’un savoir-faire et d’un enthousiasme indéniables.
Il en est de même pour la mise en scène : Sam Raimi multiplie les effets, souvent gratuitement, il est vrai, mais en adéquation avec la tonalité délirante de ses démons en roue libre. Caméra à l’envers, prises de vues subjectives, obliques, distorsion des visages, accélérés pour se précipiter vers les victimes par le point de vue des monstres, rien ne nous est épargné. C’est assez amusant, et cela compense l’agacement à l’encontre des personnages, qui, en plus d’être très mal joués, prennent un temps déraisonnable à ouvrir des portes ou rester à proximités de zombies infectés.
On s’amuse comme on peut. Une cabane au milieu des bois, un livre maléfique et des nuages noirs devant la lune semble suffire Evil Dead pour devenir culte. Dans son genre, il fait le boulot, mais reste toujours à déterminer si ce genre a de l’intérêt.