Premier essai derrière la caméra de l'écrivain / scénariste Alex Garland, Ex Machina ne semblait pas franchement, au premier abord, tirer son épingle du jeu avec son univers d'anticipation et ses thématiques mille fois étudiées au cinéma, à la télévision ou dans la littérature.
Construit comme un huis-clos, si l'on excepte une poignée de séquences tournées au coeur des magnifiques paysages de la Norvège, Ex Machina va rapidement jouer cartes sur table, nous révéler ses véritables intentions. Conscient de naviguer en terrain connu, pour ne pas dire balisé, Alex Garland (accompagné de Glen Brunswick à l'écriture) va simplement user de son point de départ science-fictionnel pour nous amener vers autre chose.
Alors que Ex Machina semblait emprunter un chemin proche du troublant A.I. de Steven Spielberg, avec son androïde sur le point d'accéder à un véritable état de conscience humaine, Alex Garland préfère se focaliser non pas sur la robotique (même si cet élément reste important), mais bien sur l'humain. A travers un triangle pour le moins particulier, jouant efficacement sur la notion de domination et de manipulation, Garland ausculte l'homme, s'interroge sur ce qui nous définit en tant qu'être humain.
Plus qu'un simple élément perturbateur, l'être artificiel est donc le réceptacle de la folie des hommes, le déclencheur d'une réflexion passionnante, pour ne pas dire inconfortable, sur notre besoin d'interaction, sur nos peurs, nos angoisses, nos désirs, notre rapport à l'autre et notre instinct de survie. Un regard glaçant, peu flatteur pour nous, l'homme étant décrit ici soit comme un jouet, un instrument, ou un être englué dans sa propre mégalomanie, simple insecte se prenant pour Dieu.
Si l'ensemble manque tout de même d'une structure narrative solide, n'évitant pas toujours un côté bavard et sur-explicatif, Ex Machina bénéficie d'un soin tout particulier apporté à son cadre, extrêmement pensé, géométrique, et à sa bande sonore, envoutante. Les effets visuels sont également excellents, servant avant tout l'histoire, tout comme le casting, le trio Gleeson / Isaac / Vikander se montrant parfait du début à la fin.
Sans être un classique instantané de l'anticipation, Ex Machina parvient à réussir son pari en détournant soigneusement les attentes occasionnées par son sujet. Esquisser une réflexion loin d'être inintéressante sur l'être humain à partir d'un canevas somme toute assez convenu. Prometteur.