Le mythe arthurien a souvent inspiré les cinéastes qui ont choisi le romanesque ou le symbolisme ; avec les Chevaliers de la Table Ronde, Richard Thorpe livrait un spectacle très hollywoodien en Cinemascope et couleurs acidulées où Lancelot avait l'allure d'un chevalier-cowboy de roman breton. Robert Bresson en tant qu'adepte de l'anti-péplum, donnait dans l'épure et le métaphysique avec son Lancelot du Lac. Les Monty Python dans Sacré Graal, passaient à la moulinette de l'irrespect la noble légende en faisant sautiller le roi Arthur pendant que son page imitait les cataclops des chevaux. Eric Rohmer lui, versait carrément dans le minimalisme austère dans son Perceval le Gallois. La légende fut même transformée en comédie musicale dans Camelot...
John Boorman opte pour le flamboiement visionnaire en s'écartant de la légende mais l'important étant de rester fidèle à l'esprit et non à la lettre. Qu'on soit bien d'accord, il ne s'agit pas de l'oeuvre rêvée de cette fabuleuse légende, mais de la vision d'un réalisateur. A l'aide d'une mise en scène léchée, au clinquant pompier, ses images collent à la musique de Wagner en un ballet et un crépitement magiques. C'est la vision épique d'un réalisateur inspiré, aux plans travaillés pour leur richesse, en dépit d'un délire graphique visible dans des armures trop étincelantes, des casques et des armes à forme étrange, et où la violence va de pair avec la beauté.
Je me souviens vaguement de l'accueil réservé au film en 1981, les critiques américains avaient détesté, ils trouvaient ce film clinquant et prétentieux, mais ça n'a pas freiné le public qui lui y a vu une cohabitation de frissons mythologiques, de combats sanglants, de merveilleux celtique, et de poésie sensuelle. C'est une somptueuse suite de tableaux où certains acteurs ont fait des débuts remarqués (Helen Mirren, Liam Neeson ou Gabriel Byrne), une épopée envoûtante qui entremêle un soupçon d'âge d'or hollywoodien avec une féerie visuelle propre au début des années 80.