Pas un grand film, mais des rouages terriblement bien huilés. Ou plutôt graissés, étant donnée la forte tendance du réalisateur à s'amuser avec des prothèses visqueuses. Latex, gélatine, cartilage et autres tissus organiques sont à l'honneur, intimement mêlés à de l'électronique de pointe et c'est la grande réussite du film (chapeau bas pour le pistolet de l'affiche, c'est du grand art). Cette atmosphère ocre et moite que vous n'êtes pas près d'oublier, dans laquelle Jennifer Jason Leigh masturbe une manette de jeu qui évoque une sculpture de Louise Bourgeois, donne lieu à d'étranges acrobaties anatomiques : ainsi Jude Law, chirugico-phobique reconverti, se retrouve-t-il affublé d'une prise "plug & play" que sa partenaire humecte d'un doigt lascif avant de lui enfoncer le câble de connexion au creux des reins. eXistenZ est tout d'abord une intéressante prospection sur l'avenir du jeu vidéo, avec tout ce que celui-ci comporte d'addictif, d'alternatif au réel, et donc de réalité parallèle. Et c'est là que se loge le deuxième intérêt : Cronenberg nous ballade d'un univers mental à l'autre, jusqu'à nous perdre entre deux mondes. Et mêle habilement souvenir et fantasme, libre-arbitre et scénario, pour camper un univers onirique assez crédible, dont Christopher Nolan n'a hélas pas dépassé le niveau malgré les tambours et trompettes d'"Inception",11 ans plus tard. D'autant que malgré toute sa bizarrerie, eXistEnz reste parfaitement cohérent sur le plan scénaristique. Au fait, j'ai un bioport dans le dos, là, non ?
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