À l’approche des élections de mi-mandat, pour lesquelles les américains doivent renouveler leur confiance en leurs représentants politiques, le trublion Michael Moore prend sa caméra afin de déstabiliser le régime de Donald Trump. Documentaire ou clip de campagne ?
Ceux qui attendent des films documentaires de la part de Michael Moore l’ont abandonné depuis longtemps. C’est bien des pamphlets engagés et orientés que ce contestataire facétieux réalise depuis près de 20 ans. Il n’en demeure pas moins un auteur brillant dans l’art d’exposer ses idées, maniant à la perfection le montage, l’humour ironique et le choix de ses bande sonore. Dans ce film en particulier, la diminution de la part accordée aux interviews par rapport à celle des montages d’images d’archives illustrant une voix-off souligne à quel point l’auteur ne cherche même plus à se dissimuler derrière une démarche pseudo-documentaire. Il ne reste plus qu’à être réceptif aux idées du bonhomme à la casquette de travers et à l’allure débraillée pour apprécier ses œuvres.
Plutôt que d’accabler Donald Trump – il n’en a pas vraiment besoin -, Michael Moore tente de mobiliser les abstentionnistes, « plus grand parti des dernières élections ». Cherchant à comprendre ce phénomène massif de non-engagement, il pointe du doigt l’arrogance de l’establishment politico-médiatique. Il s’en va ensuite sur le terrain de diverses mobilisations citoyennes, afin de rappeler qu’il est encore possible de faire entendre sa voix, même dans une pseudo-démocratie pourrie par le pouvoir de l’argent. Sur un ton beaucoup plus désabusé qu’à l’accoutumée, Moore prévient que si la mobilisation ne prend pas, le basculement dans un régime autoritaire digne des heures les plus sombres du vingtième siècle sera alors inévitable. Venant de la part d’une des seules personnes ayant prédit l’élection de Donald Trump, ça fait plutôt froid dans le dos.
Fahrenheit 11/9 est donc porteur de réflexions pertinentes, légitimant même ses outrances énormes lors des comparaisons avec le Troisième Reich. Cependant, on sera moins indulgent devant les longues digressions sur le scandale de l’eau potable à Flint, l’engagement d’adolescents suite à des tueries dans leurs écoles ou encore face à divers portraits de candidats au congrès censés représenter le nouveau visage de l’engagement politique. Habituellement réputé pour maitriser parfaitement le rythme de la narration, Michael Moore perd ici le focus de son propos et l’intérêt de ses spectateurs. En ratissant trop large, il aborde une multitude de thèmes et de portraits qui restent beaucoup trop superficiellement traités pour captiver une audience non-américaine.