232,8 degrés à l'ombre (ça fait chaud)

Comme j'ai déjà résumé le scénario et les grandes idées du récit dans ma critique sur le livre, je vais surtout ici aborder les différences qui existent entre le roman d'origine et l'adaptation de François Truffaut. Notons globalement que si des différences existent, le récit/propos général reste globalement le même et les modifications ont essentiellement lieu sur la forme et non sur le fond.

En premier lieu on a quand même la disparition d'un des personnages principaux du livre en la présence de Faber qui incarnait dans le roman un ancien professeur d'anglais, résistant à cette politique - entre autres - anti-livres dans l'âme, mais trop lâche pour réellement avoir cherché à la combattre. Il sert dans le livre de "mentor" à Montag l'aiguillant comme s'il était sa raison après que notre pompier est commencé à lire, mais en même temps Montag lui permet d'exprimer cette fibre résistante cachait en lui, tout comme son courage dissimulé derrière sa peur et sa lâcheté. Avec sa disparition on perd un peu de vue l'idée du libre arbitre dont aurait toujours été privé Montag jusqu'à ce qu'il commence à lire, mais qui n'est pas complet pour autant, puisque ce dernier craint qu'à présent elle lui soit indirectement privée de nouveau par l'influence de ce professeur.

Son absence du film coïncide cependant avec une augmentation bienvenue du rôle de Clarisse, qui dans le livre apparaissait uniquement dans la première partie, comme l'initiatrice de la prise d'indépendance de Montag, avant d'acquérir une présence plus spirituelle dans le reste du roman. Elle est cette fois présente tout le long du film, fusionnant un peu son rôle avec celui de Faber puisqu'elle devient ancienne institutrice et qu'elle est celle qui révélera à Montag l'existence d'une communauté alternative…

On perd donc un peu de profondeur avec la disparition de Faber puisque sa présence montrait l'existence potentielle d'une plus large partie de la population peu convaincue par ce régime du divertissement qui s'est mis en place, mais trop craintive pour s'y opposer… rendant ainsi plus plausible la possibilité d'un effondrement de celui-ci. Toutefois, cette modification permet de développer davantage la relation Montag/Clarisse également très intéressante, le fait que l'actrice (Julie Christie) joue à la fois le rôle de Clarisse et de la femme de Montag révèle aussi de la possibilité d'une relation amoureuse entre les deux, bien que cela ne soit explicitement pas la volonté du réalisateur… Mais plus un outil pour montrer la fausse opposition entre les deux femmes principales du récit ; l'une symbolisant pour Montag la conformité à la société et l'autre son rejet…

Notons également la disparition du chien robot limier traquant Montag, remplacé brièvement par 4 pompiers volants ; très certainement pour des raisons de budget. L'apparition également d'un antagoniste chez les pompiers, jaloux de la promotion prévue de Montag, qui fera du zèle auprès de leur capitaine en - semble-t-il - le dénonçant…

La fin avec les hommes-livres et également sensiblement la même dans le fond, mais quelque chose dans la forme la rend plus aboutie dans le film et révèle mieux cette lueur d'espoir qu'ils sont censés représenter, réelle communauté où les émotions sont présentes et où le partage (de livres, mais pas seulement) sont des valeurs clés ! Là où les rues de la ville, vides et déshumanisées, paraissent froides et peu enviables. Par ailleurs, les rares figurants que le film nous montre dans ces villes, sont montrés de manière appuyée avec des comportements des plus narcissiques (comme cette femme qui embrasse son reflet dans la vitre d'un métro futuriste, où cet homme qui se fait un câlin sensuel à lui-même dans un parc).

En revanche (et pour finir) une autre idée du film avec laquelle j'ai eu plus de mal, est la présence à deux moments du long métrage de l'existence d'une sorte de journal uniquement illustré, comme une sorte de courtes bandes dessinées, mais sans le texte. C'est vraiment un accessoire dans le film, qui relève presque de la petite blague, donc je viens un peu chipoter… mais dans le livre et dans le film l'interdiction des livres est officiellement justifiés par le fait qu'ils seraient dangereux pour le bien-être psychologique, les déconnectant de la réalité, les rendant tristes, les faisant souffrir émotivement, etc. Or, c'est une question de sensibilité, mais j'ai tendance à penser qu'on peut potentiellement être aussi affecté par un récit d'image…

Donc, l'existence de ces journaux d'images (même si on ne sait pas ce qu'ils racontent) me semble peu plausible dans cette réalité…

RangDar
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le 28 mai 2023

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RangDar

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