D'un point de vue thématique, il n'y a sans doute pas de film plus riche que celui-ci. La mort, la religion, l'enfance, les tensions familiales et les relations amoureuses, ce sont autant de thèmes qu'on retrouve dans ce chef-d'œuvre de Bergman et qui sont traités de la façon la plus harmonieuse qui soit, aidés par les talents de metteur en scène de Bergman qui, à travers une histoire de cinq heures, réalise l'exploit de ne pas m'éprouver, ne serait-ce qu'une fois. La longueur est évidemment risquée, mais je considère qu'une fois qu'on est hypnotisé par la narration, il est impensable de fanfaronner sur certaines longueurs qui, avec du recul, ne font qu'enrichir des éléments indispensables au long-métrage.
Je n'ai pas tout de suite été convaincu par les plans de Bergman, du moins pas pleinement, et je dirais qu'il y a un véritable talent au niveau des cadrages. De plus, aux premiers abords cette histoire de famille en Suède n'a rien de très innovant. Et je le concède, le scénario met du temps à s'installer. Je vais même aller plus loin encore, un film aussi long qui ne se passe qu'en intérieur a de quoi en dérouter plus d'un et vous auriez raison de vous en inquiéter.
Au-delà de ces petites bévues qui peuvent empiéter sur l'expérience de certains, il m'est rarement arrivé d'être aussi attaché à des personnages. Que ce soit leur comportement, bon ou mauvais, leur souffrance, injuste ou insensée. Une douce enfance qui contraste avec la noirceur de leur monde. Je me suis senti réellement impliqué, certaines séquences me rappelant même quelques souvenirs. Il y a des scènes très fortes, très touchantes et même très symboliques. Ce qu'il y a d'encore plus merveilleux, c'est cette part de surnaturel, qui ne prend pas non plus une grande place, elle reste assez légère sans être anecdotique et surtout, elle embellie l'envoûtement qu'on peut avoir devant ce monument du cinéma suédois.
Fanny et Alexandre semble être un aboutissement pour Bergman, du moins le résultat obtenu en atteste et je n'aurais pas de difficulté à le croire. Ce film étant mon premier saut dans l'univers de Bergman, je ne pourrai pas affirmer s'il est plus accessible qu'un autre de ses films. Quoi qu'il en soit, j'ai la certitude qu'il fait partie de ces cinéastes hantés par le travail "bien fait" et qui ne manquent pas de se renouveler, et je ne le remercierai jamais pour m'avoir fait vibrer avec cette grande fresque familiale, pourtant inoffensive à première vue mais pourtant si personnelle et si belle. Une œuvre intimiste aussi riche que transcendante.
Magnifique testament.