Faya Dayi
6.8
Faya Dayi

Documentaire de Jessica Beshir (2021)

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La réalisatrice mexicano-éthiopienne signe avec "Faya Dayi" ("Feu mort" en oromo,) un long poème cinématographique et contemplatif, où se mêlent les images époustouflantes de beauté en noir et blanc et la musique, composée d’un mélange de chants ethniques, d’ambient et de musique néo-classique. Les braseros brûlent intensément en effet, à plusieurs moments du films, mais ils finissent par s’éteindre… Le documentaire s’attache à montrer la communauté musulmane Oromo (L’Islam est la deuxième religion avec 34 % des habitants d’Éthiopie), ses légendes, ses croyances, le désir d’émigration des jeunes ("Leur chair est ici mais leur âme est ailleurs"), la tradition, mais surtout, c’est "le goût du café qui a changé". En effet, sa culture a été remplacée par celle du khat. [Cette drogue illégale (…) en Occident dont les feuilles sont mâchées pour leur effet stimulant est consommé en grande quantité dans ce pays de 110 millions d’habitants (…) L’Éthiopie est d’ailleurs le premier producteur mondial (…) Cette pratique remonte au XIVème siècle. Autrefois, la plante était plutôt utilisée lors de rites traditionnels et religieux. (…) Désormais, le khat se consomme indépendamment de l’âge, du genre, de l’appartenance ethnique et religieuse ©Le Monde 04/19]. Le film ne cesse de faire le grand écart entre la poésie des lieux, opulents, boisés associés aux récits individuels et le mercantilisme à la baguette que génère le khat. Le film est une sorte de montée en puissance du rôle de cette plante, de la cueillette, à la mise en ballots, du premier transport à la pesée chez un grossiste, d’où repartent des cargaisons scellées… Le documentaire mêle habilement la vie de quelques personnages, d’autres actions, privilégiant à de nombreuses reprises les plans serrés sur les mains qui font. Des motifs reviennent tout au long du film, un vaste plan d’un lac, à différents instants, un vieux cheikh, le mortier qu’on utilise… Ces appartés permettent une respiration, et se singularisent par le fait que rarement, les personnages parlent en direct ; les mots sont racontés, comme la légende du début, reprise à la fin. Les visages sont souvent filmés en très gros plan, ou alors de dos, les corps en contre-jour, voilés, dans toutes les possibilités qu’offre le noir et blanc. Les travellings sont toujours très lents, parfois légèrement ralentis pour souligner le mouvement d’une étoffe, plus dynamiques sur véhicules. Les plans sont toujours impeccablement composés. L’esthétique se retrouve même dans la façon de filmer les ballots de khat. Il se dégage de l’ensemble comme la langueur d’une mélopée entêtante… Et tout à coup, jaillit la couleur, des braises incandescentes. Le khat est une drogue fortement addictive, dont les effets ressembleraient, en atténué, aux amphétamines. À voir les corps principalement alanguis, son usage ici semble plutôt plonger les consommateurs dans une vision du monde ténébreuse…

"Mieux vaut garder pour soi

Les murmures du coeur"

abel79
10
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le 13 août 2022

Critique lue 105 fois

3 j'aime

abel79

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