Fermer les yeux
7.1
Fermer les yeux

Film de Victor Erice (2023)

Quand vient le crépuscule et qu'on se retourne sur sa vie et ce qu'on y a fait

Mystère et ambiguïté du titre et de son affiche : on ferme les yeux pour mieux se re-souvenir, mais aussi pour dormir et/ou rêver, enfin on ferme les yeux d'un mort ou pour mourir soi-même.

J'avais, suite à une fausse manip, publié involontairement un tout tout début de critique et, pour je ne sais quelle raison, impossible de l'annuler. Je complète donc à la va-vite ce démarrage raté.

Je n'avais jamais, avant de voir ce très beau et très inhabituel Fermer les yeux, entendu parler de ce réalisateur espagnol : Victor Erice, 83 ans, dont c'est le premier long métrage depuis trois décennies, et qui, je crois, en avait sorti trois ou quatre avant celui-ci.

J'ai particulièrement aimé la construction (parfois en forme d'errance) du film. Il nous fait entrer, dès les premières images, dans quelque chose de prenant et d'étrange pour, quinze minutes plus tard, une fois cette intro ou séquence bien posée, nous annoncer que c'était l'attaque d'un film interrompu par la brutale (et jamais explicitée) disparition du célèbre acteur y tenant le rôle principal. A partir de là, démarrage de ce qui est ou semble être le vrai sujet du film d'Erice : qu'est donc devenu ce Julio Arenas, présumé mort mais dont le corps n'a jamais été retrouvé ? Et que devient Miguel Garay, le réalisateur du film interrompu ? Quels liens avait-il avec ce Julio Arenas, et quelle vie a-t-il lui-même mené depuis l'interruption de ce film (laquelle remonte à vingt-deux ans) ?

C'est ainsi qu'après vingt-deux années, Michel Garay est contacté par l'animatrice d'une série télé de grande audience, spécialisée dans l'exposition de "mystères non résolus", pour qu'il révèle au petit écran tout ce qu'il sait des circonstances de la disparition de ce célèbre acteur d'alors, et des raisons du non-achèvement du film qu'il réalisait. L'émission de télé remet en branle, chez Michel Garay, le désir de savoir ce qu'il est arrivé à Julio Arenas et ce qui est arrivé à sa propre vie, car suite à ce film interrompu, il n'en a plus jamais tourné d'autres. Le métrage nous raconte donc une double recherche ; il nous découvre petit à petit le comment et pourquoi d'une disparition, ainsi que le pourquoi et comment de ce qui peut apparaître de l'extérieur comme l'échec d'une vie.

Film rare, magnifique, bouleversant, au rythme lent, au déroulement sinueux et surprenant, qui nous donne l'impression, parfois, qu'il a perdu le fil de son histoire (mais que, peu importe parce que le propos était ailleurs) et puis qui y revient au détour d'un rebondissement (car la télé qui entre dans tous les foyers fait parfois des miracles)... Film au final parfaitement, magnifiquement bouclé, et de la projection duquel on sort complètement chavirés. Remués jusqu'au fond de nous-mêmes. Pleins de nouvelles interrogations.

Film crépusculaire, testamentaire, riche, d'une grande liberté, avec, par exemple, la réinterprétation, façon Victor Erice, d'une scène magique d'un célèbre film d'Howard Hawks.

Bref, un film incontournable de l'année, bien supérieur à ce que cette critique écrite au galop peut vous laisser imaginer, comme d'ailleurs, je pense, à la Palme d'Or de Cannes 2023.

Ne le ratez pas.

Créée

le 24 août 2023

Critique lue 132 fois

5 j'aime

Fleming

Écrit par

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5

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