1991 a été une année décisive pour Stephen Chow. Après avoir travaillé en tant qu’acteur de second plan à la fin des années 80 et être apparu dans pas moins de 12 films juste en 1990, l’énorme succès de All For The Winner (1990), le film dérivé de God of Gamblers (1989) avec Chow Yun-Fat, l’a propulsé au rang de star. Il était soudainement très demandé et pouvait imposer son style inimitable « Mo Lei Tau ». Pour ceux qui ne le sauraient pas, le Mo Lei Tau, littéralement « ça ne veut rien dire » ou « ça n’a aucun sens » est un genre d’humour absurde originaire de Hong Kong dont Stephen Chow a été un des fervents fers de lance. Wong Jing, voyant qu’il y a moyen de se faire un paquet de pognon, produit donc en 1991 Fight Back to School, avec Gordon Chan, encore assez novice, à la réalisation, et avec Stephen Chow dans le rôle-titre. Le succès est au rendez-vous puisque Fight Back To School est le plus gros succès de l’année 1991 à Hong Kong. Succès justifié ?
L’histoire est des plus simples. Lors d’une journée portes ouvertes du commissariat et la venue d’une classe d’une université, le chef de la Police s’est fait voler son pistolet. Un pistolet auquel il tient comme à la prunelle de ses yeux, d’autant plus qu’il l’embarquerait bien avec lui lors de sa retraite prochaine. Seul moyen pour lui de le récupérer : envoyer un de ses hommes aux allures juvéniles dans le bahut afin qu’il se fasse passer pour un élève, qu’il enquête et qu’il retrouve l’arme. Il fait donc appel à Star Chow, une de ses meilleures recrues qui n’a d’autres choix que de redevenir étudiant pour quelques temps. Sauf que Star Chow, c’est pas son truc les études. Pas bien performant du ciboulot, il va devoir faire appel à toute sa ruse pour ne pas se faire virer du bahut ou sinon, adios le pistolet de son chef. Aidé par Uncle Tat, un autre flic infiltré et transformé en homme à tout faire, et de la jolie Miss Ho, qui va décider de le prendre sous son aile, il va vite se rendre compte que certains élèves sont mêlés à un trafic d’armes. Si on devait définir Fight Back to School, on pourrait dire qu’il est un croisement entre Un Flic à la Maternelle et les Sous Doués, le tout à la sauce humour cantonais. L’intrigue principale est rapidement abandonnée afin de mettre en scène les nombreuses pitreries de Stephen Chow, aidé par son complice Ng Man-Tat avec qui il partagera une grosse partie de sa carrière. Le duo s’en donne à cœur joie, sans jamais avoir peur du ridicule ou du débile absolu, et ils sont à la base d’une très grosse majorité de gags. Tout n’est pas réussi en termes d’humour, mais le film se montre très généreux à ce niveau-là qu’il est impossible de rester insensible aux pitreries de Chow et Tat qui commencent à roder ici un style qui ne les quittera jamais durant les années 90 et le début des années 2000. Bien qu’on sente parfois la patte Wong Jing (il y a fort à parier que le gag du préservatif vienne de lui), on sent bien l’humour, ravageur pour certains / débiles pour d’autres, s’installer avec ce Fight Back to School.
Fight Back to School n’est clairement pas le meilleur film de Stephen Chow, mais c’est à n’en pas douter celui qui annonce le mieux le devenir du comédien qui sera des années durant l’acteur le plus bankable de Hong Kong. L’intrigue ressemble à un mauvais scénario de sitcom policière, mais là n’est pas le principal. On s’amuse, on rigole, devant un très bon exemple du mélange des genres que Hong Kong a pu produire à cette époque. On a des gags, beaucoup de gags, mais aussi de la romance, et de l’action lorsque l’intrigue se décide à revenir sur le devant de la scène (à environ 1h de film). Là, on sent bien que c’est le réalisateur Gordon Chan qui reprend les commandes, bien plus à l’aise lorsqu’il faut que ses acteurs prennent les armes que lorsqu’il faut filmer des gags absurdes. Le film va aller bien plus vite. Les gags continuent d’être là mais c’est la poudre qui va parler et Fight Back To School va même se montrer relativement violent. L’action est solide (à l’image de l’introduction), l’éternel méchant Roy Cheung va pouvoir une fois de plus mettre à exécution son cabotinage inimitable que les fans de ciné HK adorent ; Stephen Chow va pouvoir montrer que, même s’il n’est pas un véritable artiste martial au sens propre du terme, il se débrouille néanmoins plutôt bien ; et on va doucement couler vers le générique de fin qui, lorsqu’il retentit, nous fait dire que, bien qu’effectivement il ne s’agit pas du meilleur Stephen Chow, on a tout de même passé un très bon moment.
Immense carton au box-office, Fight Back To School lance définitivement la carrière de Stephen Chow après un All For The Winner qui mettait déjà en place son duo avec Ng Man-Tat et les gimmicks qui l’ont rendu célèbre. Un grand film, certainement pas, mais un très bon divertissement.
Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com