Comme un soleil de fin de siècle...
Plus qu'un film, Fight Club s'impose au premier visionnage, comme une grosse claque qu'on se prend sans s'y attendre. Pour beaucoup, qui n'ont pas vu le film en général, il ne représente qu'une énieme péloche ou des mecs torse nus se foutent sur la gueule pendant 2h, on peut y trouver (heureusement) beaucoup plus.
Film aux milles facettes, énorme pamphlet envers la société et ses travers consuméristes et uniformisants, l'oeuvre adaptée du livre de Chuck Palahniuk ne pose pas les questions, il y répond a sa manière et de façon anarchique et schizophrène. La force viscérale du film se trouve dans sa faculté à nous exposer de manière frontale la faille béante au bord de laquelle nous tentons de garder l'équilibre; tout se vide que l'on comble de meubles en kit, de recherche de soi, et de cette quète d'émotion. Ressent-on vraiment se que l'on vit? Seul au milieu de la foule, qu'est ce qui nous fait sentir important tant le clonage de l'esprit des masses peut s'avérer pesant, et l'on s'aperçoit que nos vies ordinaires si égales entre elles ne sont parfois guidées que par des idéaux ou des slogans rabachés par la publicité et les médias.
Chaque plan, chaque scènes peut s'interpréter d'une façon différente par chaqu'un et cela car les degrés de lecture sont nombreux et n'ont de commun que le but initial du film, filer un coup de pied au cul de notre conscience (oui oui ça se fait) et surtout redonner de l'importance a notre singularité, pour que l'on arrive a se dire : je suis cet homme là et je ressent ça.
Tout ceci est trés subjectif je l'accorde, mais c'est le film qui veut ça, en faisant en quelque sorte d'Edward Norton notre double a l'écran, il n'a d'ailleurs pas de nom déterminé et un peu de la meme façon que l'on peut nommer notre héros au début d'une partie d'un jeu d'aventure, Norton deviens notre avatar se lançant dans un périple où il croisera toute sorte de monstres, une aventure intérieure, il penetrera des grottes peuplées de pingouins, se frottera a des hommes aux gros seins, prendra des coups et en donnera, jusqu'a se retrouver face au boss final, sa propre conscience, Tyler Durden.
On a tous en nous quelque chose, non pas de Tenessee, mais de Tyler Durden. On a tous parfois du mal a trouver le sommeil, a se sentir vivant et l'on cherche souvent à booster nos émotions, a éprouver de l'ampathie ou de la joie, ce n'est pas si évident que ça. Le héros cherche a briser sa solitude, a justifier son existence par sa présence addictive a toutes sortes de réunions de cancéreux ou autres égratignés de la vie; mais un grain de sable va venir enrailler son nouveau quotidien pathétique. Une femme.
"On est une génération d'hommes élevés par des femmes, je suis pas sur qu'une autre femme soit la solution à nos problèmes."
Fight Club, Tyler.
Et forcément d'un volupte de fumée, le personnage de Marla viens semer le trouble dans le quotidien éraillé de Norton, et va réveiller en lui des doutes, d'autres doutes encore. C'est a partir de ce moment là que l'ombre va prendre le dessus, que le double se fait maitre, que Tyler Durden passe la seconde et que par le biais de la création du Fight Club va foutre un bordel monstre, mélant exacerbation de la virilité et comportements extrèmes, tu veux sentir ta vie? Tu va gouter au sang, te flinguer a la soude afin de devenir le vrai toi.
Et si dans le film, l'histoire au premier plan peut passer pour un hymne au terrorisme, a l'anarchie, et une critique primaire de nos sociétés, la véritable sève est nourrie par se combat contre nous meme, tout faire péter, ok, mais dans nos tètes.
Le role torturé de l'unique personnage féminin important du film prouve au combien, alors qu'il est si difficile de s'accepter soi-meme, la confrontation avec l'autre, l'autre sexe (bref l'inconnu) et tout le bouleversement qu'il provoque est une épreuve rude et souvent douloureuse.
Toutes ces analyses et ces questionnements ont quelque chose de trés adolescent, et c'est sans doute pourquoi le film nous aura autant marqué, car c'est l'age formateur, où l'on ouvre les yeux ou du moins on tente de le faire. Si je suis peut etre allé trés loin dans mon explication c'est pour démontrer que par ces 139mn, Fincher aiguise son propos, ses images et sa rage pour dépeindre une violence qui ne n'absout pas que par les coups, une violence qui nous vampirise et que l'on ne comprends pas toujours, la violence d'etre un homme dans une société moderne occidentale.
Après le fond, on va vite fait parler de la forme, tout aussi géniale, Fincher après un Seven qui fait fondre les chaussures par sa tension moite et son jeu de piste dans The Game, excelle à nous montrer a chaque séquences des images travaillées, des mouvements de caméra altruistes et parvient a force de détails ingénieux a créer un conte noir, malsain et percutant idéalement mis en musique par la bo exceptionnelle des Dust Brothers et porté par deux acteurs au firmament.
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