Qu’elle semble loin l’euphorie de Whiplash et La La Land ! Tout n’est que morgue dans First Man : les morts s’accumulent au fur et à mesure des expériences de la NASA, Neil Armstrong n’est pas « excité » d’aller sur la Lune, il est « satisfait » (« pleased », dit-il en conférence de presse, sans le moindre sourire). Il faut dire que Neil Armstrong a perdu sa petite fille et que sa quête, qui l’emmène aux portes de son intégrité physique et psychologique, n’est autre que celle de Karen, qu’il espère sans doute, irrationnellement, retrouver sur le satellite terrien (sublime scène où Armstrong abandonne le bracelet de sa fille dans un cratère lunaire). Pas de fil rouge évident entre les trois films de Chazelle donc, et pourtant, en creux se dessine un véritable parcours d’auteur avec First Man : on y retrouve cette intensité, cette course folle vers l’avant, l’abnégation des personnages, cette poésie qui s’immisce toujours par surprise. Avec First Man, Damien Chazelle s’affirme réellement comme l’un des réalisateurs les plus passionnants et éclectiques de sa génération.