Misfits.
Epuisé par la logistique infernale de son "... Baron de Munchaüsen", le cinéaste Terry Gilliam semblait vouloir revenir à un cinéma plus modeste, plus libre, moins dépendant d'un succès public...
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le 8 févr. 2015
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The Fisher King est un film dans la lignée de ce qu'on pourrait appeler le réalisme magique, et un des premiers films à flirter avec la fantasy urbaine ; un genre peu rependu au cinéma. Evidemment la fantasy est ici sujette à interprétation car elle vient directement de la folie de Parry.
The Fisher King parle des bousillés et des salopés, pour reprendre l'expression Nietzschéenne tirée du monologue de Jack au Pinocchio que le gamin lui donne le prenant pour un clochard ; de ceux qui ne sont pas digne d'eux même ; de ceux qui sont perdu. Mais est ce qu'on peut partir en quête de quoi que ce soit si on ne s'est pas perdu au préalable? Le Graal, c'est la rédemption de Jack et son passage de connard égocentrique à un homme se souciant plus des autres, un homme qui comprend qu'on ne peut être heureux si on est le seul à l'être.
The Fisher King est un film magique ou l'on s'aperçoit que la beauté se trouve parfois plus facilement dans les poubelles, dans ce qui a été jeté au rebut. Et puis bien sur il y a le Graal: simple trophée dans la maison d'un milliardaire. C'est une image forte qui nous dit que ça n'est pas le fait de trouver le Graal qui est important, mais le chemin intérieur qu'on suit pour le trouver ; le changement qui s'opère en nous dans sa quête. Le passage d'une vision égocentrique à une vision altruiste étant le seul moyen de s'accomplir, comme s'il fallait s'oublier un peu pour devenir ce qu'on est véritablement. C'est un peu un contrepied de Nietzche, même si le but est le même : deviens ce que tu es. Je ne connais pas suffisamment bien le philosophe Allemand pour pousser plus loin l'analyse, mais il me semble qu'il y a peut-être cette volonté du scénariste et de Gilliam lui-même de lui donner tort, de dire que bien des chemins mènent à l'accomplissement de soi. (Ou peut-être de lui donner raison d'ailleurs, faut vraiment que je lise Nietzche ailleurs que sur wikipedia !).
En plus de tout ça, j'adore Gilliam, et même si ce film n'est qu'une œuvre de commande, on y retrouve ses obsessions et principalement le leitmotiv qui parcours chacun de ses films : la folie et de sa mince frontière avec l'imagination.
C'est un thème constant chez Gilliam que ce soit dans Brazil (échapper à la réalité par le rêve), L'Armée des douze singes (questionnement sur la réalité, plus tout le passage à l'asile), les aventures du Baron Munchausen (la folie/imagination soutient les histoires et la vie elle même), Las vegas parano (autre réalité à travers la drogue),... Il en va de même avec The Fisher King.
Le film possède aussi quelques scènes magnifiques telles que la scène ou l'amour fou (mais peut-on vraiment aimer quelqu'un sans folie?) de Parry transforme une foule anonyme en un grand contingent de danseurs. J'aime également beaucoup la scène ou Parry raconte à Jack la parabole du roi pêcheur et qui résume à elle seule ce que le film cherche à faire passer.
En plus de tout ça, il y a Jeff Bridges impérial comme à son habitude, et le meilleur rôle de Robin Williams. Tous les seconds rôles sont absolument formidables même lorsqu'ils n'apparaissent que peu de temps (une accolade spéciale à Tom Waits et à Michael Jeter dans les rôles de l'ancien combattant à roulette et de la diva à moustache). Il faut également souligner la belle prestation d' Amanda Plummer , déjantée, et attendrissante au possible, comme de Mercedes Rhuel qui a reçu l'oscar mérité de meilleure actrice de second rôle pour ce film.
The Fisher King, c'est un récit initiatique, une histoire parlant d'amitié, de rédemption, de guérison, d'amour, avec une bonne dose d'humour aussi. C'est un film formidable (mais je trouve tous les films de Gilliam formidables à une exception près), peut-être un peu trop accessible à une audience mainstream ce qui expliquerait qu'il est boudé par les fans de cinéma qui pensent trop et ne ressentent pas assez pour reprendre une phrase de Chaplin
En conclusion, j'ai juste envie de détourner la chanson du film et de vous dire « I like The Fisher King, how about you ? »
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Créée
le 14 juil. 2012
Modifiée
le 30 août 2012
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