Quatre mois d'écart entre la sortie outre-atlantique et la sortie française. Je ne comprend pas, Flight a pourtant tous les éléments pour rassembler le public français : La notoriété de Denzel Washington, Robert Zemeckis pas méconnu et un sujet catastrophique et dramatique à même de rassembler différents publics : jeunes pour la séquence de crash et plus matures pour le traitement de la post-catastrophe. De plus, on l'a appris récemment, Flight est nominé pour deux oscars (meilleur Acteur pour Denzel et meilleur Scénario original). Précisons aussi que le reste du casting est bien intéressant (John Goodman, Don Cheadle, Melissa Léo ou Kelly Reilly, superbe anglaise).

Le scénario a déjà pour lui l'atout d'être inspiré d'une histoire vraie, ça rassemble le public et ça plaît. Tendance actuelle où l'on aime retrouver une réalité contemporaine dans le cinéma. L'histoire, c'est celle de Whip, pilote de ligne alcoolique et addict aux drogues, qui se retrouve au commande d'un avion dont l'issue est le crash. S'il parvient à sauver la quasi-totalité des personnes à bord, il n'en est pas pour autant un héros et se voit attribuer la responsabilité des quelques personnes décédées. Une audience doit déterminer sa culpabilité. L'histoire se rapproche de ce pilote d'avion canadien qui avait réussi l'exploit de poser un avion en difficulté et de sauver les 300 passagers à l'intérieur. Après avoir été érigé en héros, un journaliste dévoila son passé oublié de criminel, ce qui le plongea dans l'envers du décor de la célébrité. Jamais le traitement du film se focalisera sur le journalisme ou la célébrité non voulue (du moins explicitement), il sera avant tout question des démons qui rongent Whip.

Zemeckis revient au cinéma live après une période animation et honnêtement j'en attendais mieux ! Le début est prometteur, Après avoir ciblé les enfants pendant trois films, il nous sort une introduction mature, certes clichée du pilote et de l'hôtesse, où l'alcool, la drogue et le sexe s’entremêlent et se permet un effet stylistique sur la prise de coke. Sympa ! La séquence du vol est plutôt prenante, le capitaine qui boit avant de voler, c'est un peu exagéré par contre, mais ce n'est rien par rapport au reste du traitement du film. Bref, la séquence est prenante, la manière dont Whip va reprendre le contrôle de son engin est pleine de suspens et on assiste à des manoeuvres impressionnantes.

C'est certainement la meilleure partie du film. Entre temps, on aura suivi les mésaventures d'une toxico qui va croiser la route de notre héros à l’hôpital. Coup de foudre prévisible. Mais là où c'est intéressant, c'est le traitement du héros, qui oscille entre sa désintoxication personnelle et une replongée brutale dans l'alcoolisme. Flight ne laissait pas présager un tel focus sur l'alcoolisme et ça me plaît. Malheureusement ça ne prend absolument pas. A la manière de Leaving Vegas où je trouvais que Nicolas Cage en faisait trop, Denzel ici surjoue et caricature l'alcoolique notoire (apparemment, il suffit de jouer un alcoolique pour être nominé aux oscars). Une séquence s'attarde sur une dispute entre Whip et la toxico, il est soul, elle sort d'une réunion d'alcoolique anonyme, et il lui gueule dessus parce que son ego en a pris un coup. 15s après, on le retrouve sobre, se fondant dans de plates excuses auprès de sa nouvelle compagne. Elle le laisse pourtant et on ne la reverra plus

Le problème dans Flight, c'est que Zemeckis propose quelque chose qui hésite entre une réalité moche et peu enclin à l'espoir, et la bienséance américaine où chacun peut se relever et s'ériger en homme libre. Il n'y aura pas de spoiler mais la fin est tout ce qu'il y a de plus morale et de détestable dans la production américaine. La réalité est plus moche que ça. Pourtant il y a quelques bonnes idées de fond, la réunion entre les différents membres de la compagnie et leur ressenti sur la catastrophe, vulgaire mais pertinent. La promulgation étonnante (!) de la drogue pour rendre les individus aptes à se présenter dans un cadre judiciaire ou la tendance américaine à s'approprier des héros.

Après, il faut aussi souligner un gros problème du cinéma américain. Le fait qu'il se repose sur des facilités scénaristiques et de grosses ficelles. Pourquoi, à un jour de l'audience, Whip découvre la porte ouverte de la chambre voisine remplie d'alcool ? Pourquoi il se laisse aller alors qu'il sait très bien que sa vie dépend de cette audience ? Même un alcoolique ne prendrait pas ce risque !!

Sur le plan visuelle et sonore, mis à part quelques effets, on a affaire à tout ce qu'il y a de plus standard. Une musique rythmée qui n'innove pas et une mise en scène correct qui n'explore jamais le sujet. A préciser enfin, que le casting n'est clairement pas développé. Kelly Reilly est écarté au milieu du film, John Goodman ajoute une value humoristique au film mais se révèle anecdotique tandis que Don Cheadle n'est pas assez étoffé. Enfin Mélissa Léo apparaît seulement à la fin du film, même si elle brille pendant 5 minutes !

Concrètement, c'est une petite déception. Le rythme du film empêche pourtant de réellement s'ennuyer et s'appuie sur la performance relative de Denzel Washington. Les aspects sombres et tabous de la société dépeignent un tableau cinglant de cette Amérique enclin aux problèmes d'alcools, de drogues, d'économie et d’ultra-médiatisation. Mais le problème vient du traitement de l'alcoolisme, trop cliché et faisant appel à des facilités scénaristiques. De même que l'aspect familial paraît vraiment stéréotypé (la relation avec son fils et son ex-femme à la fin). Dommage, car il y avait matière à proposer un produit de bonne qualité.

Un futur oublié des oscars, j'en suis sûr !
Softon
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le 11 janv. 2013

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Kévin List

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