Arroseur arrosé

Le premier long-métrage de Christopher Nolan, devenu une star de la profession, qui se voit désormais confier des budgets pharaoniques, prouve que le britannique avait bel et bien un talent inné indépendant des dollars, des acteurs prestigieux ou des effets spéciaux dernier cri.

En effet, "Following" a été tourné avec 6000 dollars de budget et des comédiens amateurs, et pourtant c'est un petit thriller manipulateur fort sympathique, qui m'aura fait passer un moment agréable en dépit de ses maladresses évidentes.
Un noir et blanc plutôt classieux (permettant en outre de limiter les défauts visuels), un scénario retors à souhait, et une foule de bonnes idées, telle est la recette du succès de "Following".

Nolan expérimente ici la narration déstructurée, qu'on retrouvera notamment dans "Memento" deux ans plus tard, de même que l'utilisation (partielle) du noir et blanc. Ce parti-pris donne de la profondeur à l'intrigue, sans nuire à la compréhension du récit, et sans impacter l'effet de ses rebondissements ni de son twist final.

Bon, il faut tout de même reconnaître l'artificialité du projet, reposant sur le plan aussi improbable qu'alambiqué imaginé par un petit escroc, qui aurait toutes les chances de foirer lamentablement dans la réalité. Mais comme je reste client de ce genre de récit manipulateur, je cède assez volontiers à la suspension consentie de l'incrédulité.

Un mot sur les comédiens : s'ils font certes preuve d' une certaine gaucherie à l'occasion, je trouve que Jeremy Theobald et Alex Haw ne déméritent pas, incarnant deux personnages antinomiques auxquels on finit par croire, malgré leur caractérisation minimaliste.