Sois con, jeune homme, et tu seras heureux
Je dois l'avouer à ma courte honte, j'ai presque aimé ce film la première fois que je l'ai vu. La jeunesse, l'abus de substances illicites et un engouement naïf pour les effets spéciaux numériques alors en plein décollage sont autant de circonstances atténuantes à cette faute de goût. Car franchement, ce film est nauséabond, c'est une apologie hypocrite et sans aucun recul de l'ordre moral défendu par la droite américaine. L'a-t-on assez dit, Forrest Gump est l'Américain idéal selon Reagan, Bush et toute la clique du Parti républicain: ce n'est pas seulement qu'il soit limite attardé mental (même si ça aide pour le reste), c'est qu'il est un con obéissant. Sportif, il obéit à son entraîneur; troufion, il obéit à ses supérieurs; redevenu civil, il obéit à la sacro-sainte loi de la libre-entreprise. Et toujours il obéit à la morale chrétienne, ne perdant sa chasteté que presque contre son gré (et on ne l'y reprendra plus).
Résultat, il est béni de la Providence. Il devient riche à millions alors que les fauteurs de troubles--hippies, militants contre la guerre du Vietnam, Noirs qui ne savent pas rester à leur place, consommateurs de drogues et femmes trop libérées pour leur propre bien--meurent par balle ou du sida, et ils l'avaient bien cherché. N'avaient qu'à "faire leur paix avec Dieu" comme le lieutenant Dan qui, lui, retrouve le droit chemin à la fin.
Deux étoiles pour les effets spéciaux, parce qu'il y a quand même ça à sauver. Tout le reste est à jeter.