En 2008, Garage, le deuxième film de Lenny Abrahamson, avait fait sensation (en tout cas sur moi). Il revient aujourd'hui avec un autre petit ovni ciné qui va pourtant aussi passé inaperçu malgré la présence du grand Michael Fassbender. Il fait dire que l'acteur passe 80% du film avec une énorme fausse tête. Tirée d'une histoire vraie, Frank est sans aucun doute le film le plus sensible et le plus poétique de ce début d'année. D'entrée, le metteur en scène impose une ambiance très particulière, aussi bien grâce à la lumière qu'aux personnages. La vie monotone de Jon (excellent Domhnall Gleeson, fils de...) qui rêve de devenir rock star, bascule soudain en rencontrant un mystérieux groupe. Si tous les personnages sont clairs dans leurs démarches, il n'en est rien, bien sûr, de Frank. Jusqu'à un dénouement terriblement poignant. La mise en scène et le scénario sont des merveilles de sensibilité et d'émotion, même s'ils n'évitent pas deux ou trois petites longueurs et quelques scènes un peu bancales. C'est drôle, absurde, décalé, beaucoup moins léger qu'il n'y paraît, et même par moment très noir. On est tour à tour intrigué puis fasciné par ce personnage, tout comme d'ailleurs les autres protagonistes, interprétés par les excellents Maggie Gyllenhaal et Scoot McNairy ou le français inconnu François Civil (Catacombes). On sort de là un peu déboussolé, mais bouleversé et enchanté par ce film inclassable et déroutant, que quelques petits défauts rendent finalement d'autant plus attachant. Un très joli moment, mélancolique, intense et émouvant. Une belle surprise.