"There can only be one Frank."
"Prepare for rapture ! " Car voici arriver Frank et son groupe, les SORONPRFBS.
Le groupe réunit une belle brochette de tarés : la folle furieuse, le manager déprimé, le français qui ne parle presque pas un mot d’anglais, la batteuse qu’on ne remarque jamais. Et il y a aussi Frank, qui joue définitivement hors de toute catégorie. Avec son immense tête en papier mâché, le chanteur charismatique du groupe au nom imprononçable illumine les scènes dans lesquelles il apparaît et provoque l’hilarité quasiment systématique. Il est fascinant et plein de surprises. Comparé aux névrosés du groupe, Frank est avec le héros Jon, le seul esprit sensé de la bande de musiciens. Jon, c’est le nouveau claviériste recruté sur le tard pour remplacer un ancien membre aux penchants suicidaires. Le jeune homme est tout ce qu’il y a de plus ordinaire, il dépareille parmi les personnalités hautes en couleurs de ses compagnons. Domhnall Gleeson était un choix tout indiqué. L’acteur apporte à son personnage un jeu simple et naturel. Il fait des merveilles d’un rôle sans consistance et fade par rapport à celui de ses collègues. Malgré ses erreurs, on se prend d’affection pour lui, au point de souhaiter son intégration totale à l’étrange groupe de musique.
Qui dit film étrange sur la musique dit bien sûr bande-son étrange ! Les compositions des SORONPRFBS constituent un beau mélange de grand n’importe quoi. Elle est cependant agréable, et entendre la fameuse "I love you all" chantée par Michael Fassbender lui-même pendant le générique fait plaisir à entendre.
Comme vous vous en doutez, avec des idées aussi loufoques, les occasions de rire ne sont pas rares. L’humour, provoqué surtout pas les décalages entre Jon et les autres, ou bien par les attitudes de Frank, fonctionne parfaitement. L’ouverture du film même provoque le rire, alors qu’on entend les pensées de Jon alors qui cherche l’inspiration dans ce qu’il voit pour composer son tube.
Mais prenez garde à ne pas juger trop légèrement cette œuvre singulière !
[De grands méchants spoilers vont suivre dans le paragraphe suivant]
« Frank » n’est pas seulement l’histoire d’un groupe qui va vous faire rire. Le film est un drame sur la maladie mentale enrobée d’une dose de comédie décalée. Michael Fassbender, abandonnant toute fierté pour son rôle, allant même jusqu’à cacher tout son sex-appeal (quel gâchis), se dévoile de plus en plus, pas si sensé que cela finalement. De gentil musicien farfelu, il devient touchant sur la fin. Alors que ses faiblesses et traumatismes sont éclairées, on en vient même à regretter d’avoir ri de lui et de ses amis. L’interprétation de Michael Fassbender sans son masque est merveilleuse. Quel acteur exceptionnel ! Même si ce final, en perdant toute sa folie, devient plus conventionnel, le fait d’exploiter en profondeur le personnage de Frank comble l’humour par les sentiments. La dernière scène est émouvante aux larmes.
Finalement, « Frank » est une jolie surprise. Le film dépasse le statut de comédie britannique légère et propose en profondeur une vision tendre et touchante de la maladie mentale.