Difficile à croire que le réalisateur de Frantz, François Ozon, est celui qui a réalisé Jeune et jolie, Potiche, Dans la maison ou 8 femmes, films aux ambiances diamétralement opposées mais tous ayant rencontré un certain succès dans le genre qu'ils proposent. Ici, l'image en noir et blanc rappelle les vieux classiques d'antan, à l'action passive mais servis par des acteurs de prestige. En effet, on y croit à cette Allemagne d'après-guerre teintée de toutes les tensions franco-allemandes. La langue allemande est subtilement dirigée (personnellement, j'adore les sonorités de cette langue mais je sais que les avis divergent beaucoup sur ce point...) et donne du cachet à cette histoire qui oppose les Allemands aux Français, autant dans l'Histoire que dans le montage du film qui est ciselé en deux parties distinctes, présentant ainsi la famille allemande ayant perdu un fils sur le front dans un premier temps et la famille française ayant aussi subi des pertes. Cette opposition est belle car on remarque que les différences sont minimes et que c'est l'Histoire et la guerre qui ont créé cette différence dans les mentalités. Ça résonne encore aujourd'hui fortement avec tous les amalgames et les disparités que créent les médias et les politiques dans notre société. D'autant plus que les deux parties sont leadé par un super tandem, à savoir Pierre Niney qui signe ici l'une de ses plus belle performance, très juste dans la retenue et en même temps très riche émotionnellement, et sa partenaire Paula Beer qui est incroyable, autant dans sa langue natale qu'en français et dont la simple présence est totalement magnétisante. A noter également la perfection du jeu des parents allemands endeuillés, Ernst Stötzner et Marie Grüber, en quête d'un renouveau possible suite à l'arrivée du soldat ayant connu leur fils mort, interprété par Pierre Niney. C'est une histoire de mensonge, confondant mystère et amour naissant, alternant intelligemment des passages de l'ombre à la lumière lorsque le renouveau apparaît. Certes, il n'y a pas d'action, mais beaucoup de dialogues intensément interprétés. Tout reste plutôt prévisible dans l'histoire, mais le montage et la réalisation ont le don de nous emporter ailleurs, dans une autre époque, qui fait curieusement échos à la nôtre par moment. Et ce casting m'a juste subjugué par sa justesse et son investissement. Paula Beer en première ligne. Et François Ozon, encore une fois, réussit à surprendre et à convaincre par des choix de mise en scène radicaux et risqués (j'aurai jamais cru qu'un film en noir et blanc puisse me convaincre, Le Ruban blanc m'ayant profondément ennuyé). Un film hors-du-commun de ce qu'on a l'habitude de voir en ce moment et rien que pour ça je dis oui !

alsacienparisien
8

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2016

Créée

le 26 févr. 2017

Critique lue 254 fois

Critique lue 254 fois

D'autres avis sur Frantz

Frantz
Mil-Feux
6

Interminable deuil

Avant tout mitigé, perplexe et pas entièrement convaincu, me voici un peu embarrassé face à ce dernier projet de François Ozon, qui, osons le dire, n'est pas totalement clair et fait du sur-place...

le 8 sept. 2016

52 j'aime

8

Frantz
eloch
7

" Le vent se lève, il faut tenter de vivre"

Si l'on devait ajouter une couleur à la palette de François Ozon, une teinte qu'on ne lui connaît pas, ce serait celle de la subtilité ou du moins de la sensibilité. Le ton qu'il adopte dans Frantz...

le 7 sept. 2016

40 j'aime

11

Frantz
Behind_the_Mask
7

La difficile étape du deuil

Difficile de parler de Frantz et de porter un avis sur le film sans déflorer les tenants et aboutissants de son intrigue. Oh, rien de renversant, pas de twist de la muerte en vue. Non, rassurez-vous...

le 7 sept. 2016

31 j'aime

10

Du même critique

Un amour impossible
alsacienparisien
8

Récit romanesque d'une densité rare

Adaptation du roman phare de Christine Angot, "Un amour impossible" est un film fleuve qui retrace l'ensemble d'une vie. C'est étonnamment dense, percutant et fort. Les thématiques centrales vont au...

le 11 nov. 2018

21 j'aime

1

Normal People
alsacienparisien
9

La claque de la délicatesse

Normal People, c'est carrément le genre de série qu'on bichonne et qui fait du bien à l'âme, nous rappelant notre condition de mortel et explorant notre capacité d'aimer. Ça parait très perchée dit...

le 29 mars 2021

18 j'aime