Interminable deuil
Avant tout mitigé, perplexe et pas entièrement convaincu, me voici un peu embarrassé face à ce dernier projet de François Ozon, qui, osons le dire, n'est pas totalement clair et fait du sur-place...
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le 8 sept. 2016
52 j'aime
8
! SPOILERS !
Si ce film pourra en rebuter et ennuyer certains par sa simplicité, il pourra aussi en toucher d'autres pour ce même argument. En effet, Frantz ne surprend pas par son originalité mais plutôt par sa sincérité due à une histoire simple, touchante et belle.
La réalisation est un des facteurs qui surprend le plus malgré son côté académique car alterne noir & blanc et couleur. Original diront certains, maladroit diront d'autres. Et ici il y a de quoi être partagé. En effet, les passages forts et heureux sont soulignés par de la couleur ce qui donne une impression étrange tant cela semble forcé. Comme s'il y avait besoin de cela pour accentuer les émotions censées naître chez le spectateur et pour indiquer celles des personnages ; comme si François Ozon voulait montrer les faiblesses de son scénario, voire en créer *... ou il a tout simplement cru que c'était une idée originale. De plus, ce n'est presque jamais fait de façon subtile notamment dans le dernier plan.
Alors pourquoi être partagé quant à cette utilisation de la couleur si l'effet produit est raté ?
Parce que les couleurs sont aussi présentes lors des mensonges imaginés par Adrien et lors de ses souvenirs. On remarquera que c'est assez rare qu'un réalisateur mélange le noir & blanc avec la couleur et que lorsqu'il le fait, le noir & blanc est là pour indiquer un souvenir. Ici c'est le contraire : comme si les souvenirs mensongers d'Adrien avaient plus d'importance que la vérité, que le monde réel. Les mensonges deviennent réalité - et la réalité devient mensonge, ce dont on s'aperçoit à la fin lorsqu'on apprend
qu'Adrien est déjà fiancé.
Et finalement un mensonge n'est-il pas mieux que la triste réalité ? En effet, l'histoire d'Adrien aide à faire revivre une famille en deuil et redonne espoir - ce qui offre des passages touchants.
Toute la thématique sur le mensonge est d'ailleurs très intéressante car elle permet d'introduire celle du pardon. La thématique de la rancœur est aussi très présente et intéressante. On insiste donc à la rancœur post-Première Guerre Mondiale des allemands contre les français (dont Adrien est victime en Allemagne) et inversement, finalement remplacée par le pardon d'une famille rendue heureuse par des mensonges et qui grâce à ces derniers arrive à pardonner... Et tout cela est traité de façon vraiment intelligente.
Concernant les deux acteurs principaux, Paula Beer est extrêmement touchante (quelle belle découverte que celle de cette actrice ! ). Elle offre une prestation poignante, juste et d'une grande sincérité. En revanche, Pierre Niney est presque décevant ; son jeu semble forcé et on ne croit ni à ce qu'il dit ni à ses actes, ce qui nous empêche de croire à l'histoire de son personnage.
En effet, un soldat français venu fleurir la tombe d'un soldat allemand par culpabilité, inventant une histoire d'amitié car n'a pas le courage d'avouer sa faute à la famille, plus le fait de vouloir se faire pardonner par la famille du défunt, semble irréaliste.
Ça sonne faux et cela se ressent trop dans le jeu de l'acteur. Paradoxalement c'est une belle histoire en laquelle on a envie de croire - mais peut-être est-ce le choix de Pierre Niney pour incarner ce personnage qui n'est pas adéquat...
On regrettera aussi quelques longueurs mal placées et certains passages, méritant d'être plus approfondis, seulement survolés. Des moments chargés en émotions n'arrivent donc pas à nous toucher car sont trop courts... Cela dit, ce n'est pas toujours le cas.
Frantz m'a donc touché grâce à la prestation de son actrice principale, par la simplicité de son histoire et par sa réalisation en noir & blanc. Dommage qu'il y ait quelques facilités et maladresses.
Il faut apprécier ce film comme il est, c'est-à-dire un film simple et ne pas en attendre plus au risque d'être déçu.
*en créer parce qu'il s'est dit que si son film était maladroit ça le rendrait plus touchant et authentique... ? En effet, ça fait quand même un peu amateur de mélanger couleur et n&b dans une œuvre.
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Créée
le 27 sept. 2016
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