La fièvre du vendredi soir.
Si le cinéma de genre américain n'a généralement aucun problème pour s'immiscer dans nos salles, il est pourtant un maillon qui peine à franchir l'Atlantique. Je parle bien entendu du film sportif. Exceptées l'universelle saga des "Rocky" et quelques autres péloches où la discipline concernée n'a finalement aucune importance ("Raging Bull", "Fighter"...), le récit sportif est voué à l'échec dans nos contrées. Pourquoi ? Peut-être parce que la majorité de ces bandes parle football américain, baseball, hockey... Des pratiques exotiques aux règles complexes pour tout spectateur français.
Dans ce cas-là, il était évident qu'un film comme "Friday Night Lights" atterrirait chez nous directement en DVD, tant le troisième film du comédien / réalisateur Peter Berg suinte l'Amérique à des kilomètres à la ronde, le burger bien gras, le drapeau étoilé et l'hymne national. Et c'est justement ce qui en fait son charme (du moins à mes yeux), au même titre qu'un "Postman" ou un (je me faire lyncher) "Jusqu'au bout du rêve". Des films tellement encrés dans l'imagerie yankee qu'il est impossible pour eux de se faire apprécier par un public étranger. Sauf par moi, mais comme j'ai un prénom anglo-saxon, ça peut se comprendre.
Mais derrière ses énormes atours de monument à la gloire du sport number one outre-atlantique, "Friday Night Lights" est avant tout la description d'une Amérique rurale laissée sur le bord de la route par l'Oncle Sam, un microcosme où le seul intérêt, où la seule possibilité d'avenir réside dans le football. Le but de Peter Berg est ainsi de montrer les conséquences d'une telle institution sur ses joueurs, sur ses entraîneurs, sur ses investisseurs, et bien entendu sur son public. Malgré les nombreux clichés, la galerie de portraits croquée par Berg sonne incroyablement juste, sent le vécu, et touche directement au coeur quand le cinéaste s'attarde sur les liens conflictuels entre un père rêvant à sa gloire passée et un fils peinant à marcher sur les traces de son aîné, sur la difficulté d'un môme de dix-sept ans à gérer à la fois une vie familiale chaotique et un sport qu'il ne comprend plus, ou encore sur les espoirs déchus d'une jeune vedette brisée dans son élan.
Peter Berg a beau charger inutilement la mule et dérouler un récit prévisible et convenu, son "Friday Night Lights" est un bel hommage aux working class heroes, un parcours initiatique touchant et lucide sur le sport qu'il décrit, nourri par de superbes images et porté par un casting impeccable, dont le succès local donnera lieu à une série télévisée à succès une fois encore diffusée n'importe comment chez nous.