Ces petites histoires qui font partie de la grande Histoire

Difficile de passer à côté d'un film comme "Funan" du réalisateur français Denis Do, d'origine cambodgienne.


En racontant à quelques amis les histoires difficiles de sa famille au Cambodge sous le règle des Khmers Rouges, ceux-ci lui suggèrent d'en faire un film.


De son propre aveu, son passage vers l'animation n'a pas été réellement un choix et la production n'a pas coulé de source. Il a fallu du temps, beaucoup d'efforts et de réflexion pour articuler l'histoire et faire que ces récits prennent corps sous la forme de ce film.


Celui-ci raconte l'histoire d'une jeune mère, Chou, qui, lors de la prise de pouvoir du Parti communiste du Kampuchéa, appelé également Angkar, est séparée de son jeune fils de trois ans, embarqué dans un camp de rééducation citoyenne. Les parents sont ballottés d'un camp de travail à un autre, en différents endroits du pays, et rivaliseront d'efforts, au péril de leur vie, pour retrouver leur fils.


Le réalisateur n'a jamais souhaité écrire l'Histoire avec un grand H ni prétendre, de son propre aveu, inscrire son travail dans un processus de la mémoire afin d'ajouter une pierre à ce grand plaidoyer universel contre la guerre et l'oppression. Son seul et unique souhait, à la sincérité désarmante, était de raconter une petite histoire familiale dans un contexte politique et idéologique qui fera pratiquement 2 millions de victimes et lâchera sur les routes plus de 500.000 réfugiés.


Si l'on ose un résumé de la démarche de de l'auteur, nous parlons ici de "ces petites histoires qui font partie de la grande Histoire". A l'instar du film "Dans un recoin du monde" de Asahi Shimbun qui raconte la vie quotidienne d'un village japonais peu de temps avant le bombardement d'Hiroshima, la vie quotidienne est intriquée dans des événements historiques, les seconds influençant les premiers.


Réalisé en 2D et en dessin animé traditionnel, avec des décors somptueux, une animation sans faille et une narration parfaite qui jamais ne glisse sur la pente savonneuse du pathos, "Funan" est tout bonnement extraordinaire autant comme l'expression visuelle et narrative d'un artiste qu'un message douloureux, un constat sans concession sur un moment trouble de l'histoire du Cambodge et de ses habitants.

PhilippeGoderis
8
Écrit par

Créée

le 3 avr. 2019

Critique lue 260 fois

Critique lue 260 fois

D'autres avis sur Funan

Funan
ffred
9

Critique de Funan par ffred

Voilà l'exemple typique du film qu'on peut rater sans problème. Pas de promo et surtout sorti dans un circuit de salles très réduit (mais que faire devant les supers pouvoirs de Captain Marvel et...

le 13 mars 2019

14 j'aime

4

Funan
lhomme-grenouille
3

Parce que les bonnes intentions ne suffisent pas toujours...

Arf… Je suis circonspect sur la démarche de ce film voyez-vous. Un dessin-animé aux lignes douces et à la tonalité mesurée pour parler de la terreur khmer rouge, j’avoue qu’encore maintenant, j’ai du...

le 20 mars 2019

10 j'aime

Funan
Hawk
5

Funan : Film d’animation à vocation éducative

Funan est un long métrage d’animation abordant une triste période de l’histoire : le régime Khmer Rouge. Un des plus terribles ayant existé au XXème siècle. Côté animation, il retranscrit bien la...

Par

le 24 nov. 2018

7 j'aime

6

Du même critique

Night Is Short, Walk on Girl
PhilippeGoderis
8

Un délire visuel hilarant

Masaaki Yuasa est lui aussi japonais et est un grand de l'animation. Designer graphique, intervalliste, scénariste et réalisateur, il conduit une carrière très riche depuis 1989 à travers de...

le 18 févr. 2018

7 j'aime

Buñuel après l’Âge d’or
PhilippeGoderis
7

Un documentaire fiction sur l'unique documentaire de Buñuel (toujours aussi provocateur, cela dit)

En 1930 à Paris, Luis Buñuel se fait démonter après la projection de son film "Le chien Andalou". Film authentiquement surréaliste et provocateur, ça ne passe pas auprès, notamment, de la Ligue des...

le 3 avr. 2019

5 j'aime

1

Eastshade
PhilippeGoderis
7

Une jolie ballade bucolique

En parcourant des présentations du jeu "Eastshade" (du studio du même nom), beaucoup présente le jeu comme un "Skyrim" indépendant. Ayant joué (déraisonnablement) longtemps sur ce dernier, je vois...

le 3 mars 2019

5 j'aime