Après avoir propulsé sur nos écrans l'un des meilleurs (peut-être même le meilleur) films d'action des années 2010, l'inénarrable George Miller est de retour avec un nouveau "Magnum Opus" pour sa saga Mad Max, près de 10 ans après la claque magistrale de Fury Road. Alors, "Furiosa" deviendra-t-il le digne héritier du reboot de 2015 ? Sera-t-il lui aussi élevé au rang des meilleurs films d'action de sa décennie, un modèle à suivre et une œuvre culte ?
Seul l'avenir nous le dira, mais à titre personnel, la réponse est un grand oui. Sans arborer le caractère révolutionnaire de son prédécesseur "Fury Road" (qui s'était révélé comme un véritable choc et un formidable exercice de style turboboosté, apportant un vent de fraîcheur inédit et rasant tout sur son passage dans un paysage aride de blockbusters mous du genou voire carrément insipides en comparaison), "Furiosa" démontre que Miller n'a décidément plus rien à prouver, et n'a toujours rien perdu de son souffle et de sa créativité.
Les scènes d'action sont impressionnantes et ultra-travaillées, bénéficiant d'un bon sens de l'équilibre entre usage d'FX et effets pratiques, et d'un travail du son toujours impeccable. L'image précise et soignée permet de ne pas perdre une miette de l'action qui se déroule sous nos yeux, et on retrouve l'utilisation des zooms et dézooms caractéristiques de Miller. On ressent sans peine toute la vitesse des véhicules, la violence des impacts... On ne décroche pas une seconde du film et on se sent au plus proche des personnages lors des scènes de combat et de poursuite dans le désert (avec une tension montant crescendo pour les nombreuses scènes travaillées dans la durée)... comme si on y était ! Les chorégraphies et cascades millimétrées amplifient d'autant plus cette immersion et le caractère impressionnant de ces scènes. En revanche, la musique de Junkie XL est beaucoup plus effacée et en retrait dans cet opus - ce qui nous fait grandement regretter la soundtrack magistrale composée pour "Fury Road".
On notera également des plans d'ensemble grandioses et particulièrement mémorables (ex : les vues des dunes désertiques, mais aussi des forteresses stratégiques, Dementus contemplant une bataille depuis une falaise, l'immense armée-gang de motards déboulant devant la Citadelle...) qui ajoutent à l'aspect démesuré de ce monde de désolation. Monde par ailleurs développé par un scénario davantage travaillé que ne l'était celui de "Fury Road", par la construction d'un lore très riche à travers des décors et design inventifs (on retient notamment les visuels de la Citadelle avec ses Warboys, de Pétroville avec ses émeutes, du Moulin à Balles avec ses silos immenses, ou encore les images luxuriantes mais malheureusement quasi subliminales de la Terre d'Abondance)... mais également par la variété de personnages intéressants présentés dans le film.
Certains d'entre eux avaient déjà été introduits dans "Fury Road", d'autres sont nouveaux et surtout marquants par leur apparence et leur design / costume et accessoires (comme l'Homme-histoire, l'Octoboss ou la vieille éleveuse d'asticots)... mais les deux personnages les plus importants ici sont bien sûr Dementus (s'élevant d'abord comme un chef ambitieux et charismatique avant de sombrer sous la démesure de son égocentrisme et de son narcissisme, révélant son incapacité à gouverner et à faire respecter son autorité - jusqu'à chuter de la façon la plus pathétique possible) et l'héroïne éponyme du récit. Campée par la magnifique Anya Taylor-Joy qu'on ne présente plus, absolument habitée par sa performance, Furiosa s'érige comme un symbole ultra-puissant de femme forte au parcours de vie profondément traumatique, entre survie, espoir de liberté et soif de vengeance.
Ainsi, en plus de la satisfaction apportée par ce prequel héritier de "Fury Road" - auquel "Furiosa" multiplie les références, clins d'œil et jeux de miroirs visuels et sonores -, ce nouveau film offre son lot de surprises, de concepts étonnants et détonants (ex : les motos-hélicos et leurs parachutes, le char romain de Dementus...), un sacré paquet d'adrénaline et un savant mélange de gasoil et de poudre, le tout sous les rugissements exaltants des moteurs... A voir absolument sur grand écran !