Dernier coup de roue de papy Miller

George Miller s’est attaqué à l’exercice périlleux du préquel avec le personnage de Furiosa, qui est clairement le personnage principal de Fury Road, devant notre cher fou Max.

Il va sans dire que ce film est donc très attaché à Fury Road sur énormément d’aspects que nous allons aborder, et il est difficile de ne pas les comparer avec dix ans d’écart entre eux.

La mise en scène

Vous ne serez pas dépaysés avec la patte très marquée de Miller derrière la caméra. Même si Fury Road aimait jouer entre des plans de gigantisme et des plans très rapprochés pour nous plonger dans l’intimité des personnages, celui-ci reste plus calme sur les changements de cadre. On reste beaucoup plus souvent à « échelle d’homme ». Les énormes zooms pour souligner une situation ou une action de personnage font souvent mouche, mais le côté immense et la découverte d’un monde sauvage se sont tout de même un peu perdus.

Le montage est chapitré, ce qui est intéressant, car cela apporte une fluidité au récit et permet de passer d’un acte à l’autre sans forcément avoir de transition inutile.

Par contre, un choix qui tenait certainement à cœur à Miller et qui n’est pas toujours gênant mais plutôt perturbant, ce sont les accélérations de plans, de séquences. À plusieurs moments du film, on a cette sensation de le regarder en x1 et, d’un coup, juste pour la fin d’un plan ou d’une scène, on a l’impression que le film passe en x2. Fury Road avait déjà ce type de montage, mais de manière beaucoup plus discrète et légère.

Esthétiquement

Toujours aussi brillant. Soyons réalistes : qui, mieux que George Miller, est capable de faire du Diesel Punk comme lui ? Personne. Et si quelqu’un s’y essayait, la première chose qu’on lui dirait, ce serait : « Ah, tu as fait un style Mad Max ».

À l’instar des jeux vidéo où on parle de GTA-like, n’importe qui tenterait de faire du Diesel Punk post-apo ferait du Mad Max-like ! Cette esthétique ne se retrouve nulle part ailleurs. Peut-être que la série Fallout s’en approche, mais elle reste loin de la folie d’imaginer un monde aussi dingue que celui-là.

La musique, quant à elle, est beaucoup plus discrète dans ce volet. Elle est moins impactante et moins présente que dans son prédécesseur. Le thème principal de Fury Road est réutilisé à quelques moments cools, mais cela reste plus léger, comme pour annoncer qu’après Furiosa, il y aura Fury Road. Et nous allons parler de ça tout de suite.

Qu’est-ce que ça nous raconte ?

Tout simplement la jeunesse et l’évolution de Furiosa au sein de la désolation : comment elle perd son bras, pourquoi elle veut faire fuir les épouses d’Immortan Joe (même si cela est vraiment très léger et pratiquement pas abordé dans le film), comment elle devient Imperator et conductrice du Porte-Guerre. En clair, la définition même d’un préquel. Et justement, c’est probablement ce qui est le moins intéressant du film.

Non, ce qui est intéressant dans ce film, ce sont deux choses :

1. La guerre pour contrôler les ressources nécessaires à la survie dans la désolation.

2. L’histoire de vengeance de Furiosa. Car après tout, c’est ça Mad Max ! C’est la vengeance pure et simple. Une haine si intense qu’elle vous habite jusqu’à la folie. Une seule chose occupe votre esprit, vous faisant oublier tout le reste. Vous êtes prêt à tous les sacrifices pour atteindre ce moment où votre vengeance s’achève, laissant un goût doux-amer de réussite… et de vide.

Furiosa, c’est Mad Max. Dans ce film, on voit très clairement la comparaison entre les deux. Ce sont les mêmes : habités par cette soif de vengeance et ce sentiment d’injustice. Ce film, c’est presque Mad Max 1 dans sa finalité. Et je trouve dommage qu’il s’appelle Furiosa : Une saga Mad Max. Il aurait dû s’appeler tout simplement Mad Max : Furiosa.

On a très peu parlé des acteurs, mais ils font tous le café, sans aucun doute. Chris Hemsworth est remarquable et Anya Taylor-Joy incarne bien le personnage, mais elle n’arrive pas, à mon goût, à avoir le charisme de Charlize Theron.

Pour conclure

C’est un bon film Mad Max, mais ce n’est pas Fury Road. Oui, car c’est Furiosa. Mais c’est le problème des préquels.

Quand un personnage plaît et a tout pour être iconique, on se sent tout de suite obligé d’en faire un préquel. NON, juste non. Ce personnage a son histoire, un passé, oui, mais je n’ai pas besoin de le savoir. Je me contrefous de comment elle a perdu son bras, de pourquoi elle veut faire échapper les femmes d’Immortan Joe, d’où elle vient. JE M’EN FOUS !

Le premier film nous donne suffisamment d’informations pour que nous ayons une idée de qui elle est. Et surtout, c’est ça le plus important : qui elle est à l’instant T, pas avant. Et c’est aussi ça le problème : si le préquel est plus épique que le premier, alors ce grand personnage qu’on a aimé nous paraît finalement moins incroyable. Et au contraire, si le préquel est mou et en dessous du film original, l’impression laissée par le personnage nous rend un peu dubitatifs.

Heureusement, ce film se sauve par son histoire de vengeance et reste un bon film. Mais je pense que George Miller devrait mettre un point final à Mad Max. À 80 ans, a-t-il encore de quoi le faire ? Car ni Fury Road ni Furiosa n’en sont un. Et j’ai bien peur qu’à sa mort, l’idée de traire la vache Mad Max se fasse ressentir dans l’esprit des gros studios…